Des nuits d’horreurs et un choc
terrifiant au pays du cèdre, si proche, si cher à nos cœurs. Les Libanais qui
ont déjà tant souffert de guerres, de divisions et de privations, de pillages
et d’austérité, sont une fois de plus pris en tenaille, sous les feux des
guerres de proies, de territoires et d’accaparement des richesses qui
ensanglantent l’Orient. Ce n’est malheureusement pas fini. Après avoir frappé
de missiles la terre des Libanais, 10 000 fois depuis un an, l’armée
israélienne promet un raid terrestre. L’assassinat d’Hassan Nassrallah et de
l’état-major du Hezbollah est le point d’orgue de journées de bombardements et
de terreur minutieusement préparées de très longue date. Cela redistribue les
cartes en faveur d’Israël qui, après avoir détruit Gaza et amplifier la
colonisation de la Cisjordanie, accélère la réalisation de son projet de
construction du « Grand Israël »( Eretz Israel) avec la bénédiction
et l’armement fourni par les États Unis qui cherchent à élargir leur base
avancée au Proche et au Moyen-Orient.
En pleine conférence annuelle de l’ONU, après avoir entendu les appels de
M. Biden et Macron à cesser l’escalade au Liban, il est venu prononcer à la
tribune de l’assemblée générale un discours belliqueux contre l’Iran, méprisant
envers l’ONU en son sein. À peine son discours prononcé, il a donné l’ordre à
son état-major de détruire le quartier général du Hezbollah. On ne peut être
plus cynique, pour déclencher à ce moment précis une opération criminelle
évidemment préparée depuis des mois, voire des années. Son arrogance est
fortement encouragée par le président nord-américain qui voit avec l’assassinat
de Nassrallah une mesure de « justice », après avoir réclamé de la
pondération et la désescalade tout en validant de nouvelles livraisons d’armes
qui tuent femmes et enfants à Gaza et à Beyrouth. C’est le grand royaume de la
duplicité ! Des contraintes sévères sont appliquées à l’Ukraine dans
l’utilisation des armes américaines contre la Russie qui l’a agressé, notamment
l’interdiction de frapper en profondeur le territoire russe. Mais le pouvoir
extrémiste de Tel-Aviv jouit d’une totale liberté dans l’utilisation des mêmes
armes en bafouant toutes les règles de la guerre et du droit
international ! La perfidie et la tartuferie sont au pouvoir.
Dénoncer cette hypocrisie occidentale ne nous conduit en rien à nous placer
du côté du Hezbollah qui depuis tant d’années prend le peuple Libanais en
otage. Son idéologie politico-religieuse intégriste est foncièrement opposée à
nos valeurs et à nos combats contre l’aliénation et pour l’émancipation
humaine. On ne peut oublier la multitude des assassinats pour lesquels il
est – non sans raison – accusé et son implication quasi-certaine dans
l’importation et le stockage de nitrate d’ammonium à l’origine des explosions
qui ont détruit le port de Beyrouth le 4 août 2000 ; ses crimes de guerre
perpétrés en soutien au sinistre régime syrien.
Cependant, il est un fait que Nasrallah cherchait depuis des mois un accord
avec le gouvernement israélien pour appliquer les résolutions 1701 de l’ONU
prévoyant son retrait de quarante kilomètres de la frontière au nord d’Israël.
On ne peut non plus ignorer deux données fondamentales : les forces de
l’imperium nord-américain ont depuis longtemps choisi de faire éclore des forces
politico-religieuses islamistes au moment où elles s’acharnaient à détruire les
mouvements socialistes, communistes et de libération nationale. D’autre part,
le point de départ de ce à quoi nous assistons est la non-application des
résolutions des Nations Unis prévoyant au côté de l’État d’Israël, la
reconnaissance et la construction d’un État palestinien viable.
C’est l’occupation de la Palestine et la volonté de son annexion qui
conduit à ce que nous connaissons aujourd’hui. C’est bien le pouvoir d’extrême
droite israélien et son armée qui ont rasé Gaza, provoqué des dizaines de
milliers de morts, et bien plus encore de blessés et de déplacés. Ce même
pouvoir, qui accélère l’occupation de la Cisjordanie, de Jérusalem et promet le
même sort au Liban Sud.
Le Hezbollah démolit, c’est le Liban qui sera écartelé, démembré, affaibli,
défait. Rien n’a vraiment été fait, ces dernières années, pour penser l’avenir
entremêlé du Liban, de la Palestine et de la Syrie dans le cadre d’un processus
de justice et de paix, en tenant compte de l’histoire et de la géographie.
Humilier le Hezbollah, sans contraindre Israël à renoncer à ses vues
stratégiques, ne peut porter que le malheur et nourrir les germes d’une guerre
régionale de grande ampleur. Le prix à payer serait extrêmement lourd pour les
populations de toute la région.
Au lieu d’initiative d’ampleur pour la paix, nos chancelleries et les
grands médias occidentaux se réjouissent de la terreur électronique utilisée
par le pouvoir israélien en violation du droit international.
Ces « bien-pensants » considèrent l’interception par Israël et
l’ajout d’explosif dans des bipeurs, des talkies-walkies, des panneaux
solaires, comme des prouesses technologiques alors qu’il s’agit d’actes de
guerre, d’actes terroristes. Les 4 000 explosions ainsi déclenchées ont atteint
l’intimité vulnérable des corps de nombre de Libanaises et de Libanais parmi
lesquels de nombreux enfants. Les qualifier est interdit par la nouvelle
vulgate en cours sous peine d’être traité d’antisémite !
Tant pis pour toutes les victimes tuées, blessées, défigurées, amputées,
reléguées au froid tableau comptable des pertes et profits. On entérine ainsi
la loi de la punition collective, la loi de la jungle. Celle-là même qui a été
mise en œuvre en Afghanistan ou en Irak. Avec les succès que l’on connaît !
En 1982, à quoi ont abouti les attaques d’Israël au Liban détruisant les
camps de réfugiés palestiniens de Sabra et Chatilla ? Puis celle de 2003 ?
À l’expansion et au renforcement du Hezbollah ! De la même manière que
l’étouffement de Gaza et la déconsidération de l’OLP n’ont abouti qu’au
développement du Hamas. Les bombes et le colonialisme n’ont jamais la paix et
la sécurité comme débouché. Et la tentative d’entraînement du monde dans une
« guerre de religions « ou « guerre de civilisations » n’est que
le paravent masquant les véritables intérêts en jeu : ceux du capitalisme
qui se nourrit de la course aux armements et du vol de territoires pour capter
les ressources énergétiques et de certains matériaux rares.
Nous avons nos responsabilités pour contraindre de diverses manières nos
dirigeants en Europe et aux États-Unis à rompre le pont aérien qui transporte
les armes qui tuent à Gaza et au Liban ; à faire cesser les coopérations
techniques permettant la fabrication d’armes de plus en plus sophistiquées et
non moins meurtrières pour les populations civiles ; et à mettre fin à la
mise en œuvre de l’accord d’association entre l’Union européenne et l’État
d’Israël.
Le mouvement d’actions pour la paix et la justice devrait se fortifier
ainsi que la solidarité avec les gauches et les forces progressistes arabes et
israéliennes afin de construire un nouveau rapport de force pour la paix.
Il se dit et s’écrit que Netanyahou entretient la guerre pour conserver le pouvoir.
Il y a sans doute une part de vrai dans cette assertion. La question et les
enjeux sont bien plus fondamentaux. Le grand Israël est un projet géopolitique
décisif pour les dirigeants et le grand capital nord-américain cherchant à
élargir leur sphère d’influence et d’exploitation au Proche et au Moyen-Orient.
Ivre de guerre, Netanyahou bénéficie donc de leur impunité et de leur soutien.
Voilà qui nous confère des responsabilités pour révéler et agir.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire