À quoi joue Emmanuel Macron, ou plus
sérieusement, dans quelle partie dangereuse, où il serait le seul à décider,
engage-t-il la France ? Il y a la méthode : comment le président de
la République peut-il se sentir autorisé dans un entretien pour le Parisien réalisé dans un avion au retour de Berlin à dire au pays que « notre
devoir est de se préparer à tous les scénarios » et que « peut-être
qu’à un moment donné – je ne le souhaite pas, n’en prendrai pas l’initiative –
il faudra avoir des opérations sur le terrain, quelles qu’elles soient, pour
contrer les forces russes ». On ne discute pas de la guerre ou de la
paix sur un coin de table, au mépris de la représentation nationale, et au
risque d’une déflagration lourde de conséquences pour le monde.
Il y a la sémantique. S’il ne le souhaite pas, s’il n’en prendra pas
l’initiative, qui le fera ? Et qui voudrait le faire quand le chancelier
allemand, qu’il venait donc de rencontrer vendredi en même temps que le premier
ministre polonais, lui a déclaré, en toute courtoisie mais clairement, que
c’était non ? On a la curieuse impression qu’Emmanuel Macron
tord un brin le langage comme pour préparer l’opinion à ce qui serait « inéluctable », sans
en assumer la responsabilité.
« Mal nommer un objet, c’est
ajouter au malheur du monde », disait Albert Camus. Emmanuel Macron manipule le langage pour manipuler
l’opinion. On a bien compris que sur le plan intérieur l’opération avait pour
objectif de rejeter les oppositions, et pas seulement le RN, dans le camp
présumé ou réel des Pro-poutine.
Au niveau international, la surenchère est inquiétante. Il ne faut pas se
laisser intimider, soutient-il dans le même entretien : « Nous
n’avons pas en face de nous une grande puissance. La Russie est une puissance
moyenne dotée de l’arme nucléaire mais dont le PIB est très inférieur à celui
des Européens. » Même pas peur, aurait-il pu ajouter. Mais la question
de la guerre en Ukraine est sérieuse, trop sérieuse pour qu’elle autorise à
jouer les bravaches à défaut de chercher, quelle qu’en soit la difficulté, de
vraies solutions.
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