Nous y voilà
!
Voici ici, concentrées, les grandes problématiques de la guerre
idéologique qui sous-tend la guerre contre le peuple palestinien
débuté il y a… 75 ans. Parce qu’il est activement soutenu par
l’impérium nord-américain, l’État d’Israël et ses faucons peuvent se
comporter ainsi et bafouer toutes les résolutions des Nations unies
pour la paix et la justice au Proche-Orient. Il le fait après que le
ministre de la Sécurité nationale a pu il y a quelques semaines
vociférer : « Il n’y a pas de Palestiniens, car il n’y a pas de
peuple palestinien ».
Ce même ministre a fait d’un colon qui a assassiné 29
Palestiniens priant au tombeau des patriarches à Hébron, un héros
national. Voilà le monde de l’extrême droite israélienne.
Mais, il est vrai que la question de savoir dans quel monde nous
vivons réellement est intéressante.
Est-ce un monde qui défend les droits humains consacrés par l’ONU
pour l’édification permanente de notre humanité commune ? Ou est-ce
ce monde où la défense des droits humains et de ceux des peuples ne
peut être invoquée que lorsqu’elle correspond à la protection des
intérêts des nations les plus puissantes de la planète ? Ce monde
dans lequel Israël est considéré comme la pointe avancée du
capitalisme occidental pour contrôler le Proche et Moyen-Orient ?
Est-ce un monde qui reconnaît le droit à l’auto-détermination de
chaque peuple, de chaque nation ? Ou est-ce ce monde où la domination
du fort sur le faible est acceptée en vue d’être à terme occultée ?
Est-ce un monde où le déplacement forcé d’environ un million de
personnes, privé d’eau, de nourriture, d’électricité doit être
condamné et empêché ? Ou bien un monde où les Palestiniens paient, au
prix de leur sang versé et de leurs vies, le tribut d’une histoire
avec laquelle ils n’ont rien à voir. Car, rappelons que le monde
arabe n’est pour rien dans le génocide des juifs d’Europe. Au nom de
quelle morale, de quelle mémoire, de quelle justice cette même Europe
s’alignant sur les États-Unis laisse-t-elle un État colonial surarmé
occuper illégalement la Cisjordanie et Gaza pour y mener une
politique de « développement séparé » qui a pour nom apartheid ?
Est-ce un monde vivable que celui qui fait de la politique « du
deux poids, deux mesures » sa nouvelle Bible ? Car enfin ; cet
Occident capitaliste qui, au nom de la défense de ses « valeurs », a
pu sanctionner la Russie parce qu’elle a agressé – et continue de le
faire – un État souverain, et fourni des armes à l’Ukraine, non
seulement soutient, mais aussi protège aujourd’hui Israël qui étouffe
les populations de Gaza, bombarde les civils, provoque des milliers
et des milliers de morts parmi lesquels des enfants et des
nourrissons, déplace des populations, les fait mourir de faim et de
soif. Protégé, Israël l’est par la marine nord-américaine. Et le
gouvernement dirigé par B. Netanyahu recevra à nouveau 15 milliards
de dollars d’aide militaire qui s’ajoutent aux 3,5 milliards de
dollars que le pays perçoit chaque année.
Dans un autre monde, non seulement les abominables crimes du
Hamas serait condamné, mais ses dirigeants aussitôt délogés de leur
belle villa du Qatar et poursuivis devant la justice internationale,
ses financements asséchés et le peuple palestinien serait protégé,
notamment par une force d’interposition ou de protection
internationale que sont les Casques bleus de l’ONU.
Seul le mouvement populaire mondial de solidarité pour la
justice, le droit et la paix qui a commencé avec succès, pourra faire
advenir ce monde contre les faucons au pouvoir à Tel-Aviv et les
dirigeants nord-américains et européens. La force réside dans le fait
qu’il réclame l’application du droit international.
L’argumentaire belliciste du pouvoir d’extrême droite israélien
est soutenu, répété, relayé dans les capitales occidentales, dans un
certain nombre de médias et dans les palais gouvernementaux pour
faire accepter le pire : c’est-à-dire l’éradication par la force –
non pas du Hamas – mais du peuple palestinien. La stratégie de
l’extrême droite israélienne apparait clairement : rendre la vie
impossible aux Palestiniens de Gaza, tout en continuant à coloniser,
à tuer en Cisjordanie en leur laissant le choix entre la soumission,
l’exil ou la mort. En Cisjordanie, plus d’une centaine de
Palestiniens ont été tués par des colons et des militaires ces
dernières semaines. 500 éleveurs bédouins ont été chassés de leur
terre et de leur modeste maison. Insupportable ! Nous ne crierons
jamais assez fort notre rejet pour faire reculer le bras chargé
d’anéantir un peuple.
Cependant nous ne pouvons sous-estimer le niveau de l’effort à
produire pour que triomphent la justice et la paix.
L’effort doit d’abord porter sur la déconstruction de cette
abominable thèse explicitée par l’armée israélienne selon laquelle «
soit vous soutenez Israël, soit vous soutenez le terrorisme ». C’est
cette thèse qui sous-tend systématiquement l’accusation d’antisémitisme
adressée à celles et ceux qui défendent les droits des Palestiniens.
Elle est au cœur de la diatribe israélienne contre Antonio Guterres.
Selon cette thèse, la critique du pouvoir en Israël ne saurait
s’expliquer que par antisémitisme. Argument commode pour donner carte
blanche à un pouvoir qui opprime un peuple, l’occupe, l’emprisonne et
se permet de décréter un blocus enfermant 2,2 millions de personnes
dans une petite enclave et qui veut littéralement effacer le peuple
palestinien des consciences.
On ne peut laisser réduire le peuple palestinien au Hamas. De
même le peuple israélien ne peut se réduire aux suprématistes au
pouvoir en Israël. Dit autrement : on peut
critiquer avec la dernière énergie la tuerie organisée du Hamas, le
considérer comme une organisation aux modes d’actions terroristes,
tout en défendant les droits des Palestiniens à leur État, et vouloir
la sécurité pour les travailleurs, les créateurs, le peuple israélien
tout entier. C’est ce que, nombreuses et nombreux en France et dans
le monde, nous faisons. Et nous redisons : c’est précisément la
création et la reconnaissance officielle de l’État palestinien qui
seront gages de la sécurité collective des peuples du Proche-Orient,
à commencer par les populations israéliennes.
Et ce ne sont pas les bombes qui tuent les civils palestiniens
qui permettront d’éradiquer le Hamas, mais l’assèchement du terreau
sur lequel il croît : l’injustice, le désespoir, l’occupation, le vol
des terres et de l’eau, les humiliations quotidiennes des citoyens
depuis le plus jeune âge, sans parler de l’aide d’Israël à
l’organisation islamiste elle-même, considérée par Tel-Aviv comme «
la garantie à terme de la mort de la solution à deux États ».
Ne laissons pas non plus dériver le débat sur des enjeux
religieux. Il s’agit d’une question politique de justice, de respect
du droit international, de la cause d’un peuple privé de son droit à
l’autodétermination.
C’est cet enjeu, colonial, qui bouscule aujourd’hui le monde. On
ne peut effacer l’existence d’un peuple comme on a voulu le faire
hier dans un pesant et coupable silence. La fureur jaillissante de
ces silences et de ces douleurs ne peut que se démultiplier. Que la
cause palestinienne se manifeste auprès du monde indispose au plus
haut point les faucons israéliens qui élèvent leur belliqueuse voix
contre le secrétaire général de l’ONU, tout en envoyant leurs
bombardiers et leurs chars raser Gaza. Notons qu’au cours des six
premiers jours de l’offensive guerrière, l’armée israélienne a largué
6000 bombes sur ce petit territoire soir autant que les États-Unis et
leurs alliés ont lâché sur l’Afghanistan en une seule année. Avec le
résultat que nous connaissons aujourd’hui !
En s’attaquant à Antonio Guterres, le pouvoir israélien veut
avoir les mains totalement libres. Du même mouvement, il
fracture encore plus le monde qui ne peut accepter ce qu’il fait aux
enfants de Gaza, dont on doit toujours rappeler qu’ils sont d’abord
les enfants de celles et ceux qui ont été chassés de leurs terres et
de leur maison et sont donc en grande majorité des réfugiés.
Nous en sommes au point où de plus en plus de voix, comme celles
du Centre américain pour les droits constitutionnels, de
l’organisation américaine anti-apartheid IfNotNow, d’experts de l’ONU
et de journalistes reconnus, qualifient l’offensive guerrière du
pouvoir israélien de « crime de guerre » et aussi de « crime de
génocide ». En effet, selon la convention des Nations unies pour la
prévention et la répression du crime de génocide, des actes commis « dans
l’intention de détruire, tout ou en partie, un groupe national,
ethnique, racial ou religieux comme tel » sont qualifiables de «
génocide ». La privation de nourriture, d’eau, d’électricité, les
déplacements massifs de civils, les bombardements sans discernement
peuvent relever de cette qualification juridique. Même, les juristes
de la cour pénale internationale qui ont pris la peine de se déplacer
à la porte de Rafah, ont appelé ces jours derniers au respect des «
lois de la guerre ».
Voilà le monde du ministre israélien des Affaires étrangères. Son
collègue ministre des Armées avait dit le 9 octobre : « Nous nous
battons contre des animaux humains », le président d’Israël Isaac
Herzog avait, lui, affirmant le 12 octobre que les Gazaouis portent
selon lui la responsabilité des actes du Hamas et le
porte-parole de l’armée Daniel Hagari n’a pas lésiné sur la franchise
en expliquant que le but recherché en bombardant Gaza était « les
dégâts et non la précision ». Il est vrai que, depuis, la moitié des
habitations de Gaza ont été détruites.
Aucun chef d’État et de gouvernement au monde n’aurait dû laisser
un ministre israélien insulter le secrétaire général des Nations
unies sans réagir ni réclamer de sanctions.
C’est là une partie du drame qui se poursuit : rendre, encore et
toujours, l’ONU impuissante ; détruire toutes les règles
internationales qui permettent aux nations de coexister
pacifiquement, aux peuples de vivre ensemble et de faire monde
commun. L'impérium en a ainsi décidé : pour que son règne dure, il
faut diviser, alimenter les haines.
Face à une telle entreprise de destruction, cessons de nous
plaindre à vide de l’ONU et orientons toutes nos forces vers sa
rénovation en faisant entrer les pays du Sud dans son Conseil de
sécurité, en donnant plus de poids à son Assemblée générale et en
faisant valoir l’idée de « pays protégé » pour la Palestine,
conformément à la résolution 377 votée le 3 novembre 1950 qui
étend les compétences de l’Assemblée générale pour le maintien de la
paix. Cette résolution est aussi baptisée « L'union pour le maintien
de la paix ». L’application de ce texte devrait faire cesser
immédiatement les bombardements de Gaza et organiser le déploiement
d’une force de protection internationale pour les Palestiniens. Il
faudrait pour cela que le mouvement populaire mondial pour la justice
et la paix gagne de l’ampleur afin que les États-Unis et les
institutions européennes, notamment, cessent de mettre l’ONU de côté
ou de la placer devant le fait accompli, comme ils l’ont fait en 1977
lors des accords israélo-égyptiens, en 1991 lors des négociations de
Madrid, en 2000 après les accords d’Oslo au sommet de Camp David et,
récemment, lors de la signature des accords dits « d’Abraham », à
l’instigation de Donald Trump, visant à normaliser les relations
entre plusieurs capitales arabes et le pouvoir israélien dans
l'objectif d’isoler et d’étouffer la cause palestinienne.
Voici que la résolution 377 devient centrale. On ne
peut impunément nier et renier le droit international qui prévoit la
construction d’un État palestinien viable dans les frontières
définies en 1967, avec Jérusalem-Est pour capitale, aux côtés de
l’État d’Israël dont la sécurité serait assurée.
Rappelons que 138 pays sur les 193 que compte l’ONU reconnaissent
déjà l’existence légale de l’État palestinien. Trois grandes
puissances bloquent ce processus de reconnaissance : les États-Unis,
le Royaume-Uni et la France – malgré un vote favorable de son
Assemblée nationale. Le président de la République doit cesser de
faire de grands moulinets avec ses petits bras : son bateau-Hôpital
est vide ; sa conférence pour le soutien humanitaire peut ne pas être
inutile à condition de lui donner un contenu politique et de réclamer
un cessez-le-feu, quant à son projet de mobiliser la coalition
internationale contre Daech, elle a fait de la France la risée du
monde !
Il est temps de sortir de l’alignement sur l’impérium et de
reconnaitre l’État palestinien. Produire cet acte politique de haute
intensité serait plus efficace et coûterait moins cher que les
voyages en avion de M. Macron au Proche-Orient pour balbutier
quelques propos aussi vite oubliés que prononcés.
Cette reconnaissance, agirait comme un nouvel horizon dégagé,
allumerait les bougies de l’espoir, provoquerait une telle éclaircie
mondiale qu’elle modifierait le rapport de force en faveur de la
justice et de la paix. Voilà ce que ne veut surtout pas le grossier
et belliqueux ministre israélien des Affaires étrangères.
À l’opposé, nous préférons la construction d’une Union des
peuples et des nations vivant en paix, peuples fraternels et
solidaires entre eux et nations coopérantes entre-elles, respectant
chaque individu, chaque culture et son environnement, avec un
secrétaire général des Nations unies à sa tête.
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