Où que l’on regarde, le projet de fusion de l’audiovisuel public, mené tambour battant par Rachida
Dati, suscite
inquiétude et rejet. Hier, plus d’un millier de salariés de Radio France
engageaient leur nom – dont les présentateurs célèbres de la station – dans une
tribune, avant de se préparer à 48 heures de grève. Tout aussi rare, pas
moins de cinq anciens ministres de la Culture – de gauche comme de droite – y
voient un texte absurde. La contestation vient de partout face à cette
tentative de regroupement à marche forcée.
Ce mariage gigantesque aux allures d’enterrement est dans les cartons
d’Emmanuel Macron depuis belle lurette. En 2017, le chef de l’État parlait de
l’audiovisuel public comme d’une « honte ». Sa volonté de
mettre sous contrôle les directions de ce service public n’est jamais retombée.
Avec la sarkozyste Rachida Dati en maître d’œuvre expérimentée, il peut passer
désormais à l’action. Sur la forme comme sur le fond, il y a tout à craindre.
Songez que cette vaste fusion, visant à
regrouper près de 16 000 salariés sous une même entité, va être débattue à l’Assemblée
nationale sans la moindre étude d’impact – et ne parlons pas de concertation.
Au-delà de son incantation pour une « BBC à la française », le
gouvernement est incapable d’argumenter concrètement sur les bienfaits d’une
telle décision, d’autant que les audiences des radios publiques et de France
Télévisions se portent comme un charme. En revanche, les conséquences sociales,
culturelles et démocratiques, elles, ne font guère de doute. Les salariés
feront les frais des économies d’échelle ou autres doublons. Les
« synergies », tant vantées, dilueront l’identité des différents
médias, mettront en péril le précieux maillage territorial et la pluralité des
expressions. Le resserrement de la direction accentuera la pression de l’État
et pèsera sur l’indépendance éditoriale. Ce projet de loi ne fait qu’affaiblir
le service public, tout en le caporalisant. Il représente une grave menace
démocratique. Face à la mainmise d’une poignée de milliardaires sur les médias
et à l’entrisme de l’extrême droite, l’audiovisuel public, grevé depuis deux
ans par un financement défaillant, a besoin d’investissements pérennes. Pas
d’un retour de l’ORTF version macroniste.
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