Sept jeunes sur dix pourraient bouder les urnes, le 9 juin prochain, à
l’occasion des élections européennes. Voilà un chiffre qui devrait alerter des
pouvoirs publics soucieux de répondre à la crise démocratique qui ne cesse de
miner la République. Il faut d’abord rappeler que 39 % des
18-25 ans sont mal inscrits. C’est-à-dire qu’ils résident parfois à
plusieurs centaines de kilomètres de leur lieu de vote. Le problème n’est pas
nouveau, mais ce continent caché de l’expression citoyenne ne semble pas
préoccuper nos gouvernants. Pas davantage que d’inciter les autres à exercer
leur droit civique.
Aucune campagne d’ampleur pour expliquer les enjeux du scrutin, aucun
dispositif particulier pour inonder les réseaux sociaux afin de décrypter le
fonctionnement d’une Union européenne à laquelle le président de la République
se dit pourtant si attaché. Encore moins de mesures politiques pour répondre
aux besoins criants des jeunes. Le nouveau premier ministre, un temps vendu
comme la carte jeune de l’exécutif, fait plutôt office de repoussoir. À propos
de presque tous les sujets qui concernent les jeunes, il fait le choix
sécuritaire ou celui de la stigmatisation, quand ce n’est pas la remise en selle
de la vieille rengaine d’une jeunesse dépeinte comme une classe dangereuse
qu’il y a urgence à contrôler.
Un tel positionnement n’a en réalité rien d’innocent. L’hôte de Matignon ne
s’adresse pas aux jeunes mais aux seniors, davantage conservateurs, qui sont la
cible privilégiée de la liste présidentielle. C’est en effet chez les
plus de 70 ans que le camp macroniste réalise ses seuls bons scores.
Très bas dans le monde du travail et famélique dans la jeunesse, la liste Hayer
n’est créditée que de 2 % des intentions de vote chez les 18-24 ans
par certains sondages !
Les mêmes seraient près de 40 % à voter à gauche. Dès lors, pourquoi
inciter des jeunes à aller voter, si cela sert à d’autres ? Emmanuel
Macron ne fait pas autant d’efforts à diaboliser la gauche pour, « en même
temps », l’aider à mobiliser un électorat qui lui est favorable. Calcul
cynique d’une minorité présidentielle qui ne manquera pas de regretter, au soir
de l’élection, que ceux qui incarnent l’avenir de l’Europe se soient privés de
leur droit à la construire.
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