Ce qui vient de se passer en France, l’affirmation dans la loi d’une
préférence nationale, terreau de tous les racismes, valide cette pensée
fondamentale de Walter Benjamin reprise par l’historien Patrick Boucheron dans
son petit texte Le temps qui reste : « La catastrophe n’est
pas surgissement de l’inattendu, mais la continuation du pire, dès lors que
personne ne trouve le moyen d’y contrevenir. »
Alors, comment contrevenir à la catastrophe dès lors que, depuis des
années, les pratiques démocratiques cèdent les unes après les autres, sous les
coups de boutoir idéologiques de l’extrême droite et les misérables
renoncements politiciens de la Macronie ?
Ce pouvoir dont la seule idéologie est d’être prêt à tout pour se
maintenir, peu lui chaut de se renier. Souvenons-nous des envolées lyriques au
temps de l’épidémie de Covid sur la reconnaissance des sacrifices des
travailleurs de première ligne. Ceux pour qui le confinement ne fut pas une
pause dans une maison à la campagne.
Parmi ceux-là qui connaissaient l’enfer des logements exigus et la peur
d’aller travailler pour ramasser nos ordures, nettoyer nos hôpitaux, assurer
l’approvisionnement et la distribution dans les supermarchés, combien
d’immigrés ? Tout le macronisme est dans la veulerie de ce « en même
temps » qui panthéonise Mélinée et Missak Manouchian et livre les MOI
d’aujourd’hui aux démons et aux phantasmes de l’extrême droite. Le mot « décivilisation »
qu’il accole à immigration et banlieue au moindre fait divers est en réalité la
meilleure définition de son projet de société.
L’appel « Ne promulguez pas la loi immigration » que nous lançons
aujourd’hui avec des dizaines de personnalités vise à contrevenir à la
catastrophe. Ce n’est ni de l’angélisme, ni « pour s’abandonner à
la croyance consolante des lettrés, pour qui les livres changent le
monde », comme l’écrit Patrick Boucheron. C’est, comme il le
précise, « parce qu’il est raisonnable de penser que les
changements historiques sont toujours escortés de quelques textes qui, les
précédant ou les imaginant à distance, vont leur propre train ». Avec
ce texte, l’Humanité prend date.
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