C’est l’histoire de l’insatiable quête de profit d’un
laboratoire pharmaceutique qui a fait d’une pilule potentiellement mortelle une
machine à cash. Une affaire tentaculaire qui a entraîné la mort de près de 2 000 personnes et gâché la vie de milliers d’autres. Il aura fallu le courage d’une femme, Irène Frachon,
pour enrayer cette machine infernale.
Le procès en appel du Mediator doit s’achever cette
semaine. Moins médiatisée qu’en première instance, où le tribunal de Paris
avait reconnu les laboratoires Servier coupables de « tromperie aggravée » et d’ « homicides et blessures involontaires », mais les avait relaxés du
délit d’ « escroquerie », cette nouvelle étape judiciaire n’en est pas moins
décisive. Les victimes en attendent des sanctions plus lourdes, et le parquet a
requis la « confiscation du profit », à savoir les 182 millions d’euros amassés pendant la
commercialisation de la funeste molécule.
Cette affaire emblématique de santé publique aurait pu
permettre une remise à plat de notre politique du médicament. Il n’en fut rien.
Si bien qu’un nouveau scandale sanitaire n’est pas à exclure, comme le redoute
dans nos colonnes la directrice éditoriale de Prescrire, qui
affirme que 88 médicaments plus dangereux qu’utiles sont aujourd’hui
distribués en France, dont certains seraient à retirer d’urgence.
C’est dire si les leçons du Mediator sont loin d’avoir
été tirées. Les mesures prises pour libérer médecins et responsables publics de
l’emprise des lobbies pharmaceutiques restent bien faibles pour garantir qu’un
nouveau drame n’aura pas lieu. La banalisation de ces conflits d’intérêts et la
faiblesse des moyens de contrôle démocratique des politiques sanitaires
engendrent une défiance dont s’abreuvent complotisme et obscurantisme. Pénuries
de médicaments, racket de la Sécurité sociale par les laboratoires… tout pousse
à la création d’un pôle public du médicament. Chaque proposition de loi
allant dans ce sens a été repoussée par le pouvoir macroniste. Celui-ci a
préféré, en janvier dernier, promouvoir Madeleine Dubois, lobbyiste de Servier,
officier de la Légion d’honneur…
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