Le rapport publié aujourd’hui par Oxfam sur l’envolée
des rémunérations versées aux actionnaires du CAC 40 a quelque chose de
surréaliste et d’indécent. Sur l’année 2022, le montant – record – grimpe
à 80,1 milliards d’euros, en hausse de 15,5 % par rapport à l’année dernière. Bien plus que le
budget du ministère de l’Éducation nationale (59,7 milliards),
pourtant l’un des plus importants de l’État. Sur dix ans, ces dividendes et
autres rachats d’actions ont bondi de 57 %. Trois fois plus vite que les salaires de base dans
ces mêmes entreprises. Ces chiffres, certes, ne sont pas complètement une
surprise. Mais, à l’heure des dérèglements climatiques et du creusement des
inégalités, cette captation des richesses ne peut plus être tolérée
benoîtement.
Car, évidemment, cet accaparement n’est pas neutre. Il
se fait, déjà, au détriment des revenus des salariés qui produisent cette
richesse. Mais aussi de la société tout entière, qui doit exiger de ces gros
pollueurs une transition écologique rapide et d’ampleur. Faut-il le rappeler ? À lui seul, le CAC 40 représente 84 % des émissions de
CO2 du pays. Diminuer profondément l’empreinte carbone de ces mastodontes demande des
investissements conséquents et immédiats. Or, on le voit, cet argent existe. Mieux : selon
Oxfam, 45 % du montant annuel des dividendes et rachats d’actions permettraient de couvrir, sur un an, les dépenses de ces groupes dans la transition écologique. Le problème n’est donc pas une question de moyens, mais de choix.
Jusqu’ici, celui des dirigeants de ces groupes a toujours
été de servir en priorité les rendements du capital, plutôt que d’assurer
l’avenir de la planète.
Ce modèle économique court-termiste met en danger
aussi bien la lutte contre le réchauffement que les entreprises du CAC 40
elles-mêmes, ainsi que leurs salariés. Or, il ne faut pas être naïf. Ces grands
groupes ne s’engageront pas gentiment dans une transformation en profondeur de
leur fonctionnement. Seule la contrainte de la puissance publique est
indispensable pour imposer des limites à cette prédation irresponsable.
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