Politique de la
ville : des maires alertent sur la situation « dramatique » des
quartiers prioritaires
Une quarantaine de maires de communes abritant des
quartiers prioritaires de la politique de la ville ont signé, hier matin, une
tribune dans Le Monde pour réclamer « un plan d'urgence pour les
banlieues » qu'ils jugent « au bord de l'asphyxie », notamment
du fait de l'inflation galopante.
« Nous lançons un cri d’alerte au président de
la République. » Alors que les maires sont dans l’attente de la
prochaine génération des contrats de ville, qui prendront effet le 1er janvier
prochain mais dont la philosophie devrait être dévoilée avant l’été par
le président de la République, la tribune publiée ce matin dans Le
Monde donne une idée des graves crises que traversent les banlieues
les plus pauvres et des « situations dramatiques »,
qui s’y développent.
« Détresse alimentaire »
La tribune est signée de 39 maires de communes
abritant des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV), de
toutes tailles – on trouve parmi les signataires la maire de Paris mais aussi
ceux de Saint-Martin-d’Hères (Isère) ou de Lormont (Gironde). Il s’agit
essentiellement de maires de gauche (PS, PCF ou EELV), mais pas seulement, deux
maires « divers droite » ayant signé la tribune. Font également
partie des signataires plusieurs membres des instances dirigeantes de l’AMF,
dont André Laignel (Issoudun), son premier vice-président délégué, Mohamed
Gnabaly (L’Île-Saint-Denis), et Gilles Leproust (Allones), membres du Bureau de
l’association, ou Hélène Geoffroy (Vaulx-en-Velin), co-présidente de sa
commission Politique de la ville.
Pour ces maires, c’est l’inflation qui est aujourd’hui
le problème le plus criant des banlieues populaires, avec une situation
de « détresse alimentaire » qui touche de plus en plus de
foyers : « Des habitants sont contraints de ne pas manger à
tous les repas, et le nombre de personnes qui font appel aux distributions
d’urgence alimentaire ne fait qu’augmenter. »
La deuxième alerte concerne les difficultés de
paiement des loyers : « En 2022, la moitié des organismes HLM
a enregistré une augmentation de plus de 10 % du nombre de loyers en retard de
paiement de plus de trois mois », écrivent les maires, qui savent déjà
que cette situation « va indéniablement s’aggraver en 2023 ».
Ils rappellent également que le taux de chômage dans les QPV est « 2,7
fois supérieur » à celui des autres quartiers.
La crise climatique, poursuivent les élus, frappe plus
durement les habitants des quartiers pauvres que les autres – les canicules y
étant « plus éprouvantes ». « L’affaiblissement
des services publics » conduit à une augmentation « préoccupante »
du nombre de personnes « qui ne recourent plus à leurs droits
» , et la dématérialisation des procédures ne résout rien, du fait de
la fracture numérique.
Plan d’urgence
Dans ces quartiers, « les associations
sont à bout de souffle » et les collectivités « sont
dans l’incapacité de lancer les travaux et doivent revoir à la baisse les
projets », notamment du fait de la hausse des coûts, « ce
qui amplifie le doute des habitants dans la parole publique ». Ces
habitants ont de plus en plus « le sentiment d’être abandonnés par
la République ».
Les maires demandent donc au gouvernement « un
plan d’urgence », appuyé sur trois mesures : « un
dispositif pérenne de lutte contre la précarité alimentaire », le gel
des prix de l’énergie pour les bailleurs sociaux, et un abondement de « deux
milliards d’euros » pour l’Anru (Agence nationale de la
rénovation urbaine). Ils demandent que les « droits élémentaires »
(éducation, santé, culture, sport, sécurité, emploi), soient « une
réalité pour tous », et que « le droit commun soit
rétabli dans les quartiers populaires ».
Les maires signataires se disent « disponibles
pour contribuer à élaborer des réponses pertinentes », et en
appellent « à la responsabilité du président de la République » : « Ignorer
ce nouvel appel au secours reviendrait à mépriser la situation de millions
d’habitants. »
Reste à attendre le discours que le chef de l’État
doit prononcer sur les nouveaux contrats de ville, baptisés « Engagements
quartiers 2030 », comme l’a dévoilé en avril le ministre du Logement, Olivier
Klein, pour savoir si l’exécutif entend répondre à cet « appel au
secours » à hauteur des attentes des maires et de la population.
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