La ficelle est usée jusqu’à la corde, mais les
macronistes n’ont pas fini de tirer dessus. Ceux qui prétendaient il n’y a pas
si longtemps, incarner le « renouveau » de la vie politique rejouent le coup de
l’article 40 de la Constitution, une arme classique des gouvernants de la
Ve République et de leurs soutiens pour museler les oppositions. Or, on
sait que la mauvaise foi est reine chez ceux qui s’érigent en gardien de la « charge publique » pour
interdire aux propositions gênantes de
venir en discussion. Déjà sur les retraites, en 2003, des amendements
communistes n’avaient jamais pu arriver en séance au nom du coût du papier sur
lequel il aurait fallu imprimer les rapports complémentaires qu’ils
demandaient. Ce qui en dit assez sur la bouffonnerie de cette procédure d’un
autre âge.
Cette fois, pourtant, les macronistes ont innové en
cherchant à faire obstruction au débat d’une proposition de loi inscrite de
plein droit par un groupe parlementaire dans le temps qui lui est réservé. Un
usage inédit de cette censure en forme de 49.3 déguisé, puisqu’il s’agit
d’empêcher les députés d’adopter un texte, lequel abrogerait celui qu’ils n’ont
pas pu rejeter, faute d’avoir été autorisés à voter sur la réforme des
retraites.
Derrière ce nouveau coup de force se joue en réalité
une question simple mais décisive : est-ce encore la majorité des députés qui fait la loi, comme le prévoit justement la Constitution ? Ou bien
une minorité appuyée sur un exécutif qui abuse à son profit des ressources que lui confère sa position ? Si cette proposition de loi du groupe Liot provoque
de tels remous dans le camp présidentiel, c’est uniquement dû à la perspective
très crédible que le texte soit voté en séance le 8 juin. L’argument
constitutionnel est nul et non avenu, d’autant que ceux qui le brandissent sont
juges et parties. Que leur manœuvre réussisse, et la Loi fondamentale sera à
nouveau sur la sellette. On ne l’écrit jamais assez : on attend
d’une Constitution qu’elle protège les citoyens des abus de pouvoir. Pas qu’elle les facilite en servant d’arsenal à un exécutif absout par des « sages » tout sauf impartiaux.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire