Les commentateurs de tout poil et les adversaires du Nouveau Front
populaire (NFP) ont peut-être enterré un peu vite la nomination de Lucie
Castets à Matignon. Il leur suffisait jusqu’alors d’évoquer la censure promise
par les oppositions coalisées contre tout gouvernement qui compterait des
ministres issus de la France insoumise pour faire d’une telle perspective une
chimère.
Que pèseraient dans cette circonstance, se demandaient-ils, les 193 députés
du NFP, voire les 207 (sur un total de 577) qui ont voté en faveur de la
candidature du communiste André Chassaigne à la présidence de l’Assemblée
nationale ? L’argument était commode, et même s’il n’existe aucune
majorité capable de rassembler davantage d’élus que le NFP, il a permis à
Emmanuel Macron d’écarter sans autre forme de procès l’hypothèse d’un
gouvernement de gauche : « Le sujet n’est pas un nom, (…)
c’est quelle majorité peut se dégager à l’Assemblée. »
L’objection a subi un sérieux revers, samedi. Jean-Luc Mélenchon s’est dit
prêt à renoncer à des ministres FI. La droite et le centre ont accusé le coup,
et certains ciblent désormais le programme de la coalition pourtant arrivée en
tête des législatives : pas question de laisser le NFP appliquer sa
feuille de route. Le refus des ministres insoumis était déjà difficile à
défendre d’un point de vue démocratique, mais ce n’était en fait qu’un
prétexte. La pilule risque d’être compliquée à faire avaler aux citoyens,
d’autant que la candidate à la fonction de première ministre se montre, dans
nos colonnes, ferme sur les objectifs mais ouverte sur la méthode et les
compromis à construire.
La gauche a incontestablement repris l’avantage. Elle est la seule à
disposer d’un nom, d’un programme et d’une méthode de gouvernement. Le réalisme
est de son côté, non de celui des oppositions de principe qui ne proposent que
la poursuite indéfinie du blocage. Emmanuel Macron doit trancher. Mais a-t-il
vraiment le choix ? Toutes les manœuvres pour fracasser le NFP et
renforcer le bloc de droite ont échoué. Les libéraux connaissent la chanson
qu’on fredonne cette fois à leurs dépens : « Il n’y a pas
d’alternative. »
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