Qui a dit que la télévision était un média dépassé à l’heure de l’Internet
3.0 et de l’intelligence artificielle ? Le groupe TF1 nous prouve que
le petit écran a encore de la ressource. Après l’importation en France de
la lie de la télé-réalité, sa dernière innovation laisse sans voix :
inviter un dirigeant suspecté par la justice internationale de crimes de
guerre et de crimes contre l’humanité pour lui permettre d’annoncer à
l’antenne la poursuite de ses exactions en toute impunité. Avec Benyamin Netanyahou sur LCI, jeudi
30 mai, les
frontières de l’indécence ont été franchies. Le journaliste Darius Rochebin a
eu beau rappeler quelques vérités, le premier ministre israélien les
a saisies comme autant de perches pour justifier le massacre en cours à
Gaza, allant jusqu’à se comparer à de Gaulle et à Churchill.
TF1 et LCI agiraient-ils de même demain avec Vladimir Poutine, le président
russe lui aussi sous le coup d’un mandat d’arrêt de la Cour pénale
internationale (CPI) ? Ou bien avec Omar El Bechir, l’ex-dictateur soudanais
soupçonné de génocide, ou encore avec Bachar El Assad, le chef de l’État syrien
recherché par la justice française ? Et imaginerait-on seulement les
dirigeants criminels du Hamas, visés par les mêmes chefs d’accusation que
Netanyahou, venir plaider leur « cause » en duplex ? On ose
croire que non. En réalité, cette invitation souligne et confirme combien le
leader du Likoud bénéficie d’un traitement de faveur chez une partie des médias
français, en dépit du mandat d’arrêt requis contre lui par la CPI.
Le bourreau de Gaza convié sur les écrans des foyers français, c’est le
deux poids, deux mesures dans toute son arrogance. Le déni de justice et
d’humanité en direct, un crachat sur les 36 000 morts palestiniens comme
sur le combat des défenseurs de la paix et des droits humains qui se mobilisent
sans relâche – ils étaient au moins 20 000 dans les rues de Paris, samedi,
selon le décompte souvent minimisé de la police. C’est aussi à une certaine
défaite du journalisme qu’on a assisté, jeudi.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire