« Fascisme, plus jamais. » Le slogan phare de la révolution des
œillets de 1974 a pris une claque monumentale. À l’heure où le Portugal
s’apprête à célébrer le 50e anniversaire de la chute de la
vieille dictature et le retour de la démocratie, l’extrême droite s’est
imposée, dimanche, comme la troisième force au sein de l’Assemblée de la
République. C’est une catastrophe.
L’ascension fulgurante de Chega est inquiétante à plus d’un titre, alors
que Lisbonne était hier encore épargnée par la vague brune qui dévore l’Europe.
Ce mouvement populiste créé il y a à peine cinq ans n’avait réuni que
1,29 % aux législatives de 2019, contre 18 % aujourd’hui. André Ventura
et ses acolytes ont joué à fond la carte de l’antisystème où l’alternance sans
alternative entre la droite et Parti socialiste a rythmé la vie politique de
ces quarante dernières années.
Ça suffit, de son nom français, a prospéré sur
les ruines fumantes de la crise économique qui a ravagé le pays et
l’humiliation de sa mise sous tutelle entre 2011 et 2015. Durant ces terribles
années, avec l’assentiment du PSD de Pedro Passos Coelho, les hommes en noir de
la troïka (FMI, Commission et Banque centrale européennes) ont imposé une
violente cure d’austérité qui a contraint à l’exil plus de 340 000
Portugais et jeté dans la pauvreté plus de 2 millions de personnes.
La parenthèse qu’ont constituée les accords parlementaires entre les
formations de gauche de 2015 à 2019 n’a jamais tout à fait permis de panser le
traumatisme de la déflagration sociale subie. Chega est, en quelque sorte, le
monstre de cette sinistre période.
L’extrême droite a désormais entre ses mains l’avenir du Portugal. Si
l’alliance de droite devance d’une courte tête les socialistes, qui perdent
leur majorité absolue en raison d’un trafic d’influence qui a conduit le
premier ministre António Costa à démissionner, elle échoue à réunir une
majorité à même de pouvoir légiférer seule.
Son chef de file, Luis Montenegro, assure qu’il ne conclura pas d’accord
avec André Ventura, sauf à revenir sur sa parole et pactiser avec le diable. À
moins de trois mois du scrutin européen, le signal envoyé est de bien mauvais
augures.
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