Avons-nous affaire à un gouvernement de
menteurs pathologiques ? La question se pose.
À la fin du mois de novembre 2023, le gouvernement a fait adopter un budget
de la nation sans vote du parlement. Il se vantait alors qu’il agissait dans
l’intérêt général en prenant en compte deux enjeux fondamentaux :
l’environnement et l’éducation. Le compte-rendu du conseil des ministres du 27
septembre 2023 qui présente le projet de loi de finances, claironne même qu’il
s’agit « du budget le plus vert de notre histoire ». Le communiqué
gouvernemental poursuit, « 10 milliards d’euros de financement supplémentaires
sont prévus par rapport à 2023 pour soutenir les principaux leviers de la
planification écologique et donner aux territoires, les moyens d’agir en
matière de ressources naturelles, de rénovation des bâtiments, de sobriété
énergétique, de mobilité et de décarbonations de l’industrie. C’est un
financement comprenant notamment une hausse du fonds vert pour les territoires
de 2,5 milliards d’euros. Les métiers de l’enseignement sont revalorisés et le
budget de l’éducation nationale augmentera de 3,9 milliards d’euros, après une
hausse de même ampleur en 2023 ».
Mais voici qu’à peine l’encre de ce long document budgétaire soit sèche, le
gouvernement supprime par décret 10 milliards d’euros de crédit public sous
l’autorité du même ministre des finances.
La démocratie est bafouée trois fois. Une fois en empêchant les
parlementaires d’améliorer et de voter le budget. Une seconde en le modifiant
par décret quelques semaine en supprimant ce qui était affiché comme priorité.
Une troisième fois en bafouant les règles que les gouvernants se sont eux-mêmes
données.
En effet la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances
précise que les annulations de crédits par décret ne peuvent dépasser 1,5 % des
crédits ouverts en loi de finances. Or, ici, le pouvoir raye d’un trait de
plume, l’équivalent de 2 % du total des dépenses de l’État (*). Les
parlementaires auraient tout intérêt à se saisir de l’affaire.
L’autre escroquerie a trait à la sélection des chapitres ou les crédits
sont annulés. Le gouvernement sabre précisément dans les lignes budgétaires des
missions dont il disait en novembre qu’elles étaient ses priorités.
Annulation de 2,13 milliards d’euros de crédit au chapitre « écologie,
développement et mobilité durable ». Les dispositifs d’aide aux ménages
destinés à les accompagner dans la transition énergétique comme ma prime Rénov,
le chèque énergie, l’aide à l’acquisition de véhicules propres sont réduits de
près de 1 milliard d’euros.
1,5 milliard d’euros destiné à financer les missions, enseignement
scolaire, recherche et enseignement supérieur » disparaissent sans coup férir.
736 millions d’euros sont supprimés au chapitre « cohésion des territoires
». Ceci signifie qu’on réduit les politiques d’aide à l’accès au logement à
l’amélioration de l’habitat dans un secteur immobilier, déjà en plein marasme aggravé
encore par la hausse des taux d’intérêt.
Alors que les besoins pour les hôpitaux et les services de santé sont
considérables, 70 millions d’euros vont leur être supprimé.
Le ministre des Finances raconte aujourd’hui qu’il est nécessaire de
réduire les dépenses publiques parce que la croissance sera moins élevée que ce
qu’il avait prévu au cours de l’été. Il évalue maintenant l’évolution de la
croissance à 1 % alors qu’il annonçait 1,4 % à la fin de l’été dernier.
Là encore, c’est le grand bluff ! La Banque de France, l’Office français
des conjonctures économiques et de nombreux économistes ont alerté dès
l’automne 2023, c’est-à-dire au moment où le budget était soumis au parlement,
sur le risque d’un taux de croissance française inférieur à 1 % en 2024.
L’attitude du gouvernement et du président de la République – annonçant à
l’automne imposer un budget visant à atteindre de grands objectifs pour
l’environnement et l’éducation, pour ensuite appliquer des réductions
drastiques précisément dans le budget de ces ministères – au-delà du respect
des règles se moque de tous les principes démocratique, du respect du parlement
et des engagements pris devant la nation. On voit combien ici, il s’agit de
complaire aux rapaces des marchés financiers qui se repaissent des dettes
publiques.
On sait que la vie des gens, pour ces hommes du pouvoir, n’a que peu
d’intérêt puisque seul compte la satisfaction des marchés financiers et du
grand capital, enrobée de communication à jet continue pour tenter de faire
avaler toutes les pilules de l’austérité.
Tout un art ! Ainsi, à peine nommé Premier ministre, monsieur Attal
expliquait que l’éducation nationale est la priorité des priorités, « la mère
des batailles », pour mieux dissimuler 2500 suppressions de postes inscrites au
budget 2024. Le souffle de ce moulin à paroles cachait la suppression de 478
millions d’euros de crédit de rémunération du personnel du ministère de
l’Éducation nationale. Une somme équivalente au financement d’environ 10 000
postes d’enseignants.
Et ces personnages osent donner des leçons sur les moyens de combattre les
diffuseurs de fausses informations ?
À la réduction de 10 milliards d’euros de crédit public, cette année,
s’ajouteront 20 milliards d’euros en 2025, soit 30 milliards l’an prochain. Et,
voici que la Cour des comptes prépare l’opinion en réclamant 50 milliards
d’économies d’ici deux ans. C’est bien une violente cure d’austérité qui se
prépare, alors que le pouvoir et ses perroquets ne cessent d’en appeler à la
mise en place d’une « économie de guerre. »
Comme toujours les profiteurs de cette « économie de guerre » sont les
forces du capital pour lesquelles les profits débordent encore plus que les
cours d’eau sous les pluies continues. Une crue historique de 153,6 milliards
d’euros de profits pour trente-huit des entreprises cotées en bourse.
Un déluge de rêve de 67,8 milliards d’euros de dividendes reversés aux
propriétaires-actionnaires auxquels s’ajoutent 38 milliards de rachat
d’actions. Décidément, « il pleut toujours où c’est mouillé ». Les gros
détenteurs de capitaux et de patrimoines se gavent pendant que les travailleurs
et les retraités sont mis au régime sec.
Cette gestion capitaliste et militarisée de la société atteint ses limites.
Elle est totalement inefficace, antisociale, anti-économique et
anti-démocratique. Il n’y a pas d’avenir sans investissements massifs dans le
travail, l’école publique et la formation, la santé, l’alimentation,
c’est-à-dire pour le développement humain et le progrès écologique.
Or, c’est le président de la République et le Conseil européen où il siège,
qui décident de réduire ce qu’ils appellent les impôts de production,
c’est-à-dire l’impôt sur le capital. Ce faisant, ils réduisent les moyens
disponibles pour l’école, la santé ou la transition environnementale. L’enjeu
d’une révolution fiscale se pose avec force.
Même des économistes comme Jean Pisani-Ferry et Selma Mahfouz, que l’on ne
peut pas soupçonner d’être des révolutionnaires anticapitalistes, ont demandé
(dans un rapport remis au gouvernement en mai 2023) la création d’un impôt
temporaire sur les profits exceptionnels des entreprises et les revenus des
plus riches afin de faire avancer le développement humain et la planification
écologique. Le pouvoir s’est empressé d’étouffer leurs travaux.
De partout, dans nos villes comme dans les campagnes, se manifestent le
ras-le-bol, les protestations et les défiances vis-à-vis du pouvoir et des
institutions européennes. Si ces colères justifiées venaient à donner de la
force aux extrêmes
droites alors les travailleurs comme les retraités seraient lourdement perdants.
Ils seraient enserrés dans le piège que tendent les forces de l’argent pour
préserver leur système. Au contraire, les travailleurs, les créateurs, la
jeunesse doivent se donner l’objectif de devenir maître de leur production et
de leur travail, donc de la manière de créer les richesses et de les répartir.
Ils doivent reprendre le pouvoir sur leur vie et construire ensemble une
société des communs, de la justice et de la paix.
- La loi de finances 2024 prévoyait 491,9 milliards
de dépenses en 2024
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