Le palais de Stormont de Belfast a connu une journée à marquer d’une pierre
blanche. Une journée historique. Après deux années de blocage et de boycott du
Parlement, Michelle O’Neill est enfin devenue, le
3 février, la première ministre du gouvernement nord-irlandais. Pour la
première fois, un siècle après que cette province a été rattachée à la
Grande-Bretagne, une républicaine, favorable à la réunification de
l’Irlande et à son indépendance, occupera la plus haute fonction politique.
C’est en soi une révolution. La dirigeante du Sinn Féin ne s’est pas
trompée en déclarant que cette élection ouvrait la voie à une « une
nouvelle ère », « inimaginable » pour la
précédente génération qui a vécu dans sa chair les « troubles » sanglants
qui ont opposé pendant près de quarante ans les républicains catholiques aux
unionistes protestants. « On ne peut pas changer le passé »,
mais « on peut bâtir un avenir meilleur », a-t-elle
promis. Good Luck, Michelle O’Neill !
En vertu des accords de paix du Vendredi saint de 1998, qui ont mis fin à
une guerre aux 3 500 morts, la cogouvernance, avec le poste de
vice-premier ministre, reviendra aux loyalistes du DUP, farouchement attachés
au maintien de l’Irlande du Nord dans le giron de la couronne britannique.
Il y a deux ans, à la suite de leur défaite cuisante du 5 mai 2022 au
profit d’un Sinn Féin tout triomphant, ses élus avaient opté pour la politique
de la chaise vide au prétexte des dispositions commerciales post-Brexit qui,
selon eux, fragilisaient la place de l’Irlande du Nord au sein du
Royaume-Uni. L’accord conclu avec Londres a permis de sortir de l’impasse.
La tâche qui attend Michelle O’Neill et les siens est immense. Après ce
long épisode de paralysie institutionnelle, des secteurs entiers de l’économie
– l’agriculture, le logement, les transports ou encore les écoles – sont au
point mort ou en piteux état. En début d’année, des dizaines de milliers de
fonctionnaires ont donné de la voix pour réclamer de meilleurs salaires. La
dette sociale est béante.
L’autre grand défi historique pour le Sinn Féin sera la finalisation de la
réconciliation et la tenue d’un référendum en vue d’une éventuelle
réunification de l’Irlande. Cette dernière ne sera possible qu’à la condition
de parvenir à une véritable égalité et inclusion de tous les Irlandais hier
encore méprisés par les unionistes.
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