mardi 6 juin 2023

« Les traces du temps-long », l’éditorial de Jean-Emmanuel Ducoin dans l’Humanité.



Six mois après le début de la contestation contre la réforme des retraites, constatons que les «clapotis du quotidien», entretenus par les éditocrates aux plumes et aux verbiages peu affûtés, ne survivent pas aux tempêtes de la réalité. Le cœur social bat toujours et la quatorzième journée de mobilisation, ce mardi 6 juin, à l’appel de l’intersyndicale, risque de surprendre jusque sous les lambris du Palais. Plus de 250 cortèges s’élanceront dans tout le pays. Au début de l’hiver, qui aurait imaginé tel scénario?

Depuis le 1er Mai, beaucoup s’interrogent sur la continuité (et la pérennité) du mouvement, alors que l’écrasante majorité des Français reste opposée aux 64 ans. Dans nos colonnes, la secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet, ne cache pas l’enjeu: «Nous ne pouvons pas tourner la page», assure-t-elle. Avant d’ajouter: «Les suites dépendent de la mobilisation de ce mardi.» Prenons néanmoins la mesure de la portée historique. Tous les pronostics de la Macronie et des libéraux ont été déjoués, malgré les basses œuvres et l’accumulation des dénis de démocratie contre le Parlement.

Les menaces de coup de force, «dune violence inédite» selon Sophie Binet, pèsent dailleurs de nouveau, ce 8 juin à lAssemblée, avec la possibilité dempêcher un vote sur la proposition de loi du groupe Liot, vidée de sa substance en commission. Nous connaissions le 49.3, nous nous sommes familiarisés avec le 47.1: voici désormais larticle 40! Ou comment fouler aux pieds, de manière infernale et jusquau-boutiste, tous les droits les plus fondamentaux de notre représentation nationale.

Bien qu’il n’en tienne aucun compte, le chef de l’État sait pertinemment qu’il a définitivement perdu la bataille des consciences comme celle de l’opinion, provoquant par son arrogance, sa déconnexion du monde réel et son mépris du peuple, la plus grave crise politique et sociale de notre République au XXIe siècle. Elle laissera des empreintes durables, assez insoupçonnables sans doute. Car l’avenir de nos retraites a fonctionné en point d’accroche, révélant une colère profonde et légitime. Déjà les traces du temps-long, en quelque sorte…

 

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