jeudi 25 novembre 2021

Pour que la Manche ne devienne pas un cimetière !



Le naufrage d’une frêle embarcation et la mort de 17 hommes, 7 femmes et 3 enfants à son bord est un nouvel épisode dramatique dans une interminable litanie de morts aux frontières de l’Europe. Depuis 1993, les frontières extérieures de l’Union européenne ont vu la mort d’au moins 50 000 personnes qui tentaient de les traverser, principalement en Méditerranée. Et depuis 1999, plus de 3OO personnes sont mortes à Calais et dans sa région en tentant de franchir la  frontière britannique « externalisée » en France, depuis 2004 par les accords du Touquet. Les années 2000 et 2010 ont été jalonnées de ces annonces de morts aux frontières, parfois monstrueuses comme ce millier de morts en deux naufrages successifs les 12 et 19 avril 2015. Mais aux sidérations ont succédé l’oubli, puis l’habitude qui ouvre la voie à l’indifférence. La brutalité des discours politiques contre les étrangers indésirables donne aujourd’hui à cette indifférence la forme de véritables projets politiques de rejet de l’autre et du monde. Il faut mettre ces 27 personnes décédées dans la Manche en relation avec ce qui se passe ces jours-ci à la frontière polonaise de la Biélorussie et son déploiement des policiers et de l’armée contre les migrants.

Immédiatement après le naufrage  de la Manche ce 24 novembre, les gouvernements français et britannique se sont unanimement empressés de mettre en avant la responsabilité des « passeurs criminels » ! Mais les passeurs ne sont pas responsables des morts aux frontières, ils sont les profiteurs sordides et criminels des politiques publiques des pays européens qui font des frontières des murs, des camps ou des cimetières. C’est la responsabilité de l’État français de créer des lieux sûrs de prises en charge des exilés au lieu de les laisser en errance et aux mains des passeurs.

Les frontières rendent fous : aussi bien les migrants qui sont empêchés de circuler, que les dirigeants politiques qui y voient le symbole de leur obsession nationale. Et les frontières tuent maintenant de plus en plus. Si l’on ne veut pas que la Manche devienne un cimetière, comme vient de s’y engager Emmanuel Macron, des solutions existent et peuvent être décidées immédiatement.

La mesure la plus urgente est la mise à l’abri des exilés de la région de Calais, dans des lieux sûrs, c’est-à-dire protégés des intempéries de l’hiver comme des sollicitations dangereuses des passeurs. Cette mise à l’abri doit aller de pair avec un accompagnement de leurs demandes : rester en France, aller en Grande-Bretagne, ou ailleurs. Il y des travailleurs sociaux et des volontaires associatifs qui savent faire cela, donner confiance, établir le dialogue, chercher à comprendre plutôt qu’à trier et exclure. Dans ce cadre, il peut être proposé à toutes ces personnes des voies rapides de régularisation en France. On verra alors que cette proposition peut avoir plus d’écho qu’on ne le croit, et peut répondre à la situation explosive que nous connaissons.

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