lundi 1 décembre 2025

Un maccarthysme à la française, l’éditorial de Maud Vergnol



Dans le flot d’attaques contre les libertés fondamentales, il en est une qui nécessite une mobilisation bien plus forte : la liberté académique. Sous couvert de lutte contre les « idéologies », des irresponsables politiques, du camp macroniste au RN, désignent tour à tour « l’islamo-gauchisme », les études de genre, les travaux sur les discriminations, la colonisation, ou la Palestine, comme autant de menaces pour la République.

Pressions, ingérences politiques, cyberharcèlement, procédures bâillons, annulation de colloques… Ces atteintes fragilisent la production d’une recherche indépendante au moment où notre démocratie n’en a sans doute jamais eu autant besoin, érodée par la « post-vérité », où les faits semblent avoir moins d’importance que les pulsions de l’opinion. Les chercheurs ciblés se retrouvent parfois bien seuls.

Le sujet devrait pourtant préoccuper tous les défenseurs de la démocratie. Il suffit de regarder outre-Atlantique pour comprendre ce qui nous attend si la nation ne se réveille pas pour protéger la liberté académique. En quelques mois seulement, Donald Trump a dynamité tout l’édifice de la science américaine, ouvert une chasse aux sorcières qui a déjà poussé nombre d’intellectuels à l’exil.

Partout où l’extrême droite gagne du terrain, elle restreint ou attaque frontalement l’autonomie de la recherche, met au pas les universités. La France n’est pas épargnée par cette vaste offensive. La semaine dernière, trois députés RN se sont introduits dans un campus de la Sorbonne pour mettre en scène le supposé « entrisme islamiste » dans l’enseignement supérieur. Une scène inimaginable il y a encore quelques années.

Le pouvoir macroniste avait ouvert les vannes en 2020 avec les propos de Jean-Michel Blanquer sur « l’islamo-gauchisme » à l’université. Ce n’est pas en muselant ses chercheurs ni en traquant des « ennemis intérieurs » dans les amphithéâtres que la France affrontera les défis sociaux, écologiques et démocratiques qui l’attendent. Comme le demande le mouvement Stand up for Science, le principe de liberté académique doit être inscrit dans la Constitution. Avant qu’il ne soit trop tard.

 

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