Du droit du travail au travail sans droits. Depuis une
dizaine d’années, le poison de l’ubérisation s’attaque à tous les pans de
l’économie. Pas un domaine n’échappe aux visées dérégulatrices de nos chers
libéraux et de leur mirage d’« autoentrepreneuriat ». Après l’hôtellerie,
les transports de personnes ou encore la livraison à domicile, c’est au tour des musées de subir
leurs assauts. En juin dernier, les guides conférenciers du musée national
de l’Histoire de l’immigration, jusqu’ici salariés de l’établissement public, expliquaient
comment leur mission avait été externalisée vers une société privée. Avec
obligation, s’ils souhaitaient continuer, de prendre un statut de « microentrepreneur », perdant au
passage près de 50 % de leur rémunération…
Malheureusement, ce brutal processus de précarisation n’est pas un
cas isolé. Et pourrait concerner le musée du Louvre, le saint des saints, en passe de confier à ce même genre de
prestataires privés l’ensemble du secteur des guides conférenciers à compter
de 2024.
Une telle évolution met en péril l’avenir de la
profession. L’ubérisation pressure les travailleurs, épuise leur quotidien,
fragilise leurs droits et l’avenir de notre modèle de protection sociale. Mais
ce n’est pas tout. Dans ce cas précis, elle fait peser également une lourde
menace sur la démocratisation de la culture. Les guides ne sont pas que des
passionnés d’histoire. Ils sont là pour assurer l’une des quatre missions
principales des musées, telles que définies dans le Code du patrimoine. À
savoir : « Mettre en œuvre des actions d’éducation et de diffusion visant à assurer l’égal accès de tous à la culture. » En dégradant ce métier, c’est le partage de
notre bien commun artistique qui est dégradé. Et la diffusion du savoir ravalé
au rang de produit mercantile.
Le combat des guides conférenciers nous concerne tous.
Et s’inscrit dans une lutte plus vaste contre les velléités réformatrices d’un
Emmanuel Macron, soutien indéfectible du modèle Uber. En juillet, la Lettre
A révélait comment quatre fidèles du chef de l’État le poussent à
relancer la déréglementation de nouvelles professions. Nous sommes prévenus.
S’il est un art que ces gens-là admirent, c’est celui de la précarité.
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