Est-il normal, en démocratie, que les citoyens doivent
en appeler au Conseil constitutionnel pour que leur avis majoritaire soit enfin
entendu ? Ses
membres ont pour fonction de vérifier la
conformité d’un texte à la Loi fondamentale, pas de dénouer les crises sociales et politiques de la nation.
C’est pourtant vers eux, dont le conservatisme des vues
n’est plus à démontrer, que se tourne aujourd’hui l’espoir de tout un peuple.
Sauront-ils être sensibles à la raison qui semble avoir déserté les bancs des
ministres, et prendre la décision que la sagesse impose en censurant la réforme
des retraites ? Tout les y incite, à commencer
par le choix du gouvernement de passer par une loi de financement de la Sécurité sociale
pour user du 49.3 sur les textes budgétaires. La Constitution a ainsi été détournée pour
satisfaire la volonté de passage
en force de l’exécutif. Une censure rétablirait le Parlement dans sa dignité, à
défaut de le rétablir dans ses droits.
Mais l’enjeu dépasse la lettre de la Constitution,
même si son respect est le minimum à attendre d’un gouvernement dans un État de
droit. Or, on le sait, il y a différentes façons de juger des problèmes de
constitutionnalité. Selon qu’on adopte un juridisme étroit, ou qu’on envisage
la réforme des retraites dans toute son ampleur à l’aune des principes
constitutionnels, la décision ne sera pas la même. Entre les deux, il y a toute
la latitude du regard politique des juges sur la réforme, quoiqu’ils s’en
défendent, et du sens de leur responsabilité dans ce moment historique : simple
point de droit, ou problème de société qui
questionne notre démocratie ?
Dans une autre vie, l’actuel président du Conseil
constitutionnel, Laurent Fabius, étrillait le report de l’âge de la retraite de
60 à 62 ans. C’était en 2010, sous la présidence de Nicolas Sarkozy. À
l’époque, l’ancien premier ministre observait : « En démocratie, il y a une procédure extrêmement simple : c’est de consulter les Français. » On ne voit pas pourquoi ce qu’il estimait juste
alors ne le serait plus à ses yeux aujourd’hui.
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