À moins d’un
spectaculaire revirement, José
Antonio Kast devrait devenir le 40e président du
Chili, à l’issue du second tour de
dimanche où le chef du Parti républicain jouit du
soutien des conservateurs, des libertariens et d’une partie de l’électorat du
populiste Parisi. On voit mal comment l’ancienne ministre
communiste et porte-drapeau de la gauche unie, Jeannette Jara, pourrait combler ce désavantage. La victoire probable
de l’extrême droite est un symbole aussi triste
qu’atterrant après l’interminable transition démocratique, atrophiée par
l’héritage de la dictature aux 3 300 morts et
disparus. Décidément, l’ombre d’Augusto Pinochet ne cesse de hanter
ce pays.
Les fils
putatifs du bourreau de Santiago ont saturé la campagne de leurs
obsessions : l’immigration et l’insécurité. Au diapason d’un Donald
Trump, José Antonio Kast a promis expulsions massives et main dure. Sur le
plan économique, il assure à ses concitoyens le retour de la prospérité
économique et de la rigueur, convoquant là encore sans souffler mot la
stratégie de Pinochet. Le putsch de 1973 ne visait pas seulement à
renverser la révolution socialiste en germe d’Allende, il a transformé le Chili
en un laboratoire du néolibéralisme – inspiré par les
théories de Milton Friedman –, qui a réduit les missions de
l’État à néant et consacré jusque dans la Constitution le règne des
privatisations.
Quatre ans
après avoir porté Gabriel Boric et la gauche alternative à la présidence dans
le sillage du soulèvement social de 2019 galvanisé par les inégalités criantes,
le vote pendulaire des Chiliens est à méditer. Il donne une leçon au pouvoir sortant sur
ses erreurs et ses renoncements. Mais pas seulement. En 2022 déjà, le rejet de la nouvelle
Constitution, considérée
comme l’une des plus progressistes au monde, avait démontré la force de frappe
des nostalgiques du pinochétisme et de la réaction en général.
L’absence de
travail mémoriel sur les crimes de la dictature a façonné une dangereuse
amnésie collective, savamment entretenue par les fascistes 2.0. La machine
médiatique privée et le patronat ont déroulé le tapis rouge à José Antonio
Kast. L’internationale brune est sur le point de s’offrir un nouveau scalp.

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