Certes, il y a l’épaisseur du dossier, l’infinie gravité des faits, le
nombre des accusés, l’insoutenable chronique du calvaire de Gisèle Pelicot.
Certes, il y a l’effroi, la sidération parfois, face au récit des ignominies
subies. Certes, il y a aussi – et surtout – l’indispensable exigence de
justice. Mais il y a plus encore. La cour criminelle du Vaucluse est devenue
le miroir où se reflète une société malade.
L’affaire de Mazan est notre affaire à toutes, à tous, et le courage
de Gisèle Pelicot, un doigt accusateur pointé sur le patriarcat, la culture du
viol, la réification du corps des femmes, la soumission chimique. Non, les
violences sexuelles ne sont pas un fait divers. Elles ne doivent jamais être
réduites à cela.
En refusant un huis clos auquel elle avait droit, Gisèle Pelicot a fait du
procès de son bourreau un procès pour l’histoire. De ceux capables de faire
bouger les lignes et les consciences. La couverture médiatique – y compris internationale
– donne à cette affaire sa dimension universelle. « À toutes les
victimes, je veux dire aujourd’hui, regardez autour de vous, vous n’êtes pas
seules ! » a déclaré Gisèle Pelicot, avec cette dignité qui
force l’admiration depuis le premier jour d’audience.
Elle voulait que son histoire permette à la honte de « changer
de camp ». Elle n’était pas la seule. En organisant partout en France,
samedi dernier, des manifestations de soutien, en ne laissant pas Gisèle
Pelicot demeurer un énième nom sur une liste trop longue des victimes de
violences sexuelles, les organisations féministes ne s’y sont pas trompées.
Ce procès-fleuve est symbolique à plus d’un titre. Il interroge ce que nous
sommes, individuellement, collectivement. Et en décortiquant le passé souvent
chaotique de certains accusés, où l’omerta le dispute aux sévices, il révèle en
sous-texte l’ampleur des conséquences des violences faites aux enfants. La
pédocriminalité et les agressions intrafamiliales broient des vies et
détruisent des destins. La protection de l’enfance, au même titre que la lutte
contre les violences faites aux femmes, doit être une priorité politique,
éducative, judiciaire. Le reste n’est que commentaire.
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