lundi 26 août 2024

« Poker sanglant », l’éditorial de Stéphane Sahuc dans l’Humanité.



L’offensive ukrainienne dans la région de Koursk vise trois objectifs. Le politique : démontrer que les Russes ne sont pas à l’abri des horreurs de la guerre. Et les milliers de réfugiés qui fuient les combats en sont autant de preuves vivantes et de camouflets pour Poutine. Le stratégique : forcer la main des Occidentaux en les mettant devant le fait accompli du passage d’une stratégie défensive à une stratégie offensive. Le tactique : soulager le front du Donbass en misant sur un redéploiement des forces russes pour rependre le terrain perdu dans la région de Koursk.

Si le plan ukrainien semble avoir plutôt bien fonctionné, l’objectif tactique est loin d’être atteint. Or, c’est celui qui a le plus de conséquences concrètes. Non seulement Moscou n’a pas redéployé ses forces, mais son offensive dans l’Est s’intensifie et Pokrovsk menace désormais de tomber. Tout se passe comme si, après Zelensky, Poutine faisait à son tour un pari : faire sauter le verrou du Donbass pour forcer l’armée ukrainienne à se reconcentrer et donc lâcher son offensive sur Koursk.

D’autant que le président russe vient d’envoyer d’autres messages. En bombardant les complexes énergétiques dans plusieurs régions, Moscou signifie clairement que la guerre ne s’arrêtera pas avant l’hiver, qui pourrait être extrêmement difficile pour des Ukrainiens privés d’électricité. En poussant la Biélorussie à masser des troupes le long de la frontière ukrainienne, les Russes rappellent que l’ouverture d’un nouveau front au nord est toujours d’actualité si jamais la tentation de faire mouvement au sud en direction de la Crimée trottait dans la tête des stratèges ukrainiens.

« Dans ce conflit, la Russie dispose d’une profondeur stratégique à l’échelle d’un continent riche en matières premières et en stock d’armement et de munitions, l’Ukraine tire la sienne du soutien massif et décisif des Occidentaux », analyse le général français Vincent Breton. La possibilité d’une victoire militaire qui ferait la décision n’existe pas, sauf adossée à une folle escalade. Mais sans perspectives politiques et diplomatiques, cette guerre peut encore durer longtemps.

 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

ÇA PLEURE UN HOMME !

Un homme ne pleure pas, un homme réfléchit, il fait taire son cœur, il est impénétrable.   Voilà ce que disait le vieillard vénérable au c...