lundi 11 mars 2024

« Loi de « simplification », pourquoi se compliquer la vie ? », l’éditorial de Maud Vergnol dans l’Humanité.



Vous reprendrez bien une petite cure de « simplification » ? C’est ce que compte prescrire le gouvernement avant l’été, avec un projet de loi « Pacte II » inspiré du rapport parlementaire intitulé « Rendre des heures aux Français. 14 mesures pour simplifier la vie des entreprises ». Un titre plus macroniste que moi tu meurs, beau comme une trouvaille de communicant. Il s’agit en réalité d’un nouveau millefeuille écœurant, visant à fragiliser toujours plus les droits des salariés et la démocratie dans l’entreprise.

L’une des mesures phares consisterait à réduire encore les délais de saisie des prud’hommes, déjà considérablement rabotés, passés de trente ans à cinq ans (2008), puis deux ans (2013), et un an (2017)… Ce serait six mois si cette loi était adoptée, alors que les délais de jugement n’ont fait qu’augmenter. Bruno Le Maire, plus gourmand encore, suggère même de l’abaisser à deux mois !

Au menu également, la possibilité de déroger aux accords de branche pour les entreprises de moins de 50 salariés, ou encore une élévation des seuils de déclenchement des obligations sociales. Des propositions piochées directement dans les revendications de l’organisation patronale CPME, qui applaudit des deux mains.

Parer les régressions sociales des atours séduisants de la modernité et de la « débureaucratisation » est une marque de fabrique du macronisme. Derrière un discours lénifiant, en apparence frappé au coin du bon sens et pétri de bonnes intentions, se cachent systématiquement des attaques contre le droit du travail, noyées dans une jungle de mesures. La même novlangue avait prévalu lors de la loi Pacte, en 2019, qui visait à « lever les obstacles ».

Ce « langage du non-dire », comme le qualifiait l’écrivain italien Leonardo Sciascia, ne vise qu’à dissimuler la réalité : l’attaque permanente des conquis sociaux. Plutôt que d’annoncer qu’il va achever les prud’hommes, le gouvernement va donc « alléger la charge mentale des entreprises », dixit Bruno le Maire.

Le ministre de l’Économie avait utilisé un langage beaucoup moins châtié, le 30 novembre 2023, devant les patrons de PME : « Une des premières demandes d’un chef d’entreprise aujourd’hui, c’est qu’on arrête de l’emmerder. » Plus cru, plus saignant.

 

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