C’est un curieux personnage que Guillaumin. Après des débuts plus que
remarquables, de rares réussites dans des tableaux de quais de Paris et de
personnages, ce barbu un peu échevelé peignit une longue suite de vues de la
Creuse, oscillant entre le brun et le violet. D’une famille originaire de
Moulins, Armand Guillaumin commence par travailler à l’Académie libre du père
Suisse où il rencontre Cézanne et Pissarro.
En 1874, Guillaumin fait le premier de ses
séjours à Auvers-sur-Oise, chez le docteur Gachet qui devient son ami et son
collectionneur. La même année, il prend part à la première exposition des
impressionnistes où il montre trois paysages. À la suite d’un gain de cent
mille francs (alors une fortune) obtenu à la loterie du Crédit foncier,
Guillaumin se retire dans la Creuse où il fera longtemps ses paysages bruns et
améthyste. C’est à cause de lui, pour une large part, que les adversaires de
l’impressionnisme ont accusé ses exécutants de « VIOLETTOMANIE ». On
a trop négligé Guillaumin. Il est vrai qu’il est très inégal dans sa
production, bien qu’il y eût en lui, par moments, un néo-impressionniste et un
annonciateur du fauvisme dont il inaugure les tonalités éclatantes, comme on
peut le voir dans le ciel de son « SOLEIL COUCHANT À IVRY ».
Lors de ses séjours chez le docteur Gachet, peintre
lui aussi, Guillaumin connut Van Gogh, lequel faisait grand cas de sa peinture.
C’est à Auvers que Guillaumin initia Cézanne à la gravure. Au cabinet des
estampes de la Bibliothèque nationale qu’on trouve la première eau-forte du
maître d’Aix, laquelle porte l’inscription « d’après Guillaumin ».
C’est dans l’atelier de Guillaumin en l’Île Saint-Louis, que Pissarro rencontra
Paul Signac. Guillaumin fut aussi un remarquable peintre de nus féminins (son
« Nu couché » faisait l’admiration de Van Gogh).
On a eu tort de reléguer ce peintre pré-fauve parmi
les petits impressionnistes. Une photographie le montre plutôt carré, barbu, le
nez bien planté, avec un rien de bonasserie dans l’expression. Son œuvre
devrait être un jour rassemblée en une grande exposition de ses meilleures
toiles. On y verrait Armand Guillaumin dans sa force, en dehors de ses paysages
de Crozant, souvent monotones. On s’apercevrait que ses toiles peu connues –
celles en autres où figurent des personnages – sont d’un artiste très
personnel.
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