samedi 4 novembre 2023

« VIGILANCE(S) » : le bloc-notes e Jean-Emmanuel Ducoin.



Chaque citoyen un peu raisonnable et sensible à «l’état» du monde doit se sentir mal, ces temps-ci. Singulièrement ceux qui portent l’aspiration à la paix, dans leur cœur et leurs combats, avec à l’esprit la pleine conscience que les drames du Proche-Orient ont une Histoire et des explications, et qu’il est vain d’en nier leur trace. Devant les horreurs accumulées, celles du Hamas voilà quatre semaines, celles du gouvernement israélien en réplique, nous voyons à l’œuvre le virilisme des petits bras en inhumanité qui se signalent périodiquement par leur modèle de réaction borné à des schémas dogmatiques aussi furieux que coupables. Rappelons-le bruyamment : depuis des années, avec l’épuisement des accords d’Oslo conclus il y a tout juste trente ans, les regards de ce que nous nommons improprement la «communauté internationale» s’étaient quelque peu détournés d’un conflit israélo-palestinien jugé sans issue. Inconcevable, la tentation de l’occultation s’était même imposée, au point de laisser les mains libres au gouvernement israélien d’extrême droite, sachant qu’avait échoué, dans les esprits, cette tentative de paix reposant sur un partage honorable de cette terre disputée. Un espoir d’autant plus illusoire que, pendant la même période, la colonisation israélienne de la Cisjordanie n’a cessé de s’étendre, avec son lot d’exactions semeur de haine.

Avec une organisation islamiste meurtrière d’un côté et une politique israélienne qui ne l’est pas moins de l’autre, tous les éléments d’une déflagration étaient donc en place. Elle est désormais à l’action, à un degré de folie que nous n’imaginions sans doute pas. Si les actes du Hamas sont passibles de «crimes contre l’humanité», le bloc-noteur n’oublie pas que Yasser Arafat en personne qualifiait cette organisation de «terroriste», au début des années 2000, avant que celle-ci ne remporte les élections à Gaza, après la mort du leader palestinien. Cela étant dit, et clairement dit, comment doit-on désormais qualifier les agissements d’Israël à Gaza ? Les citoyens que nous sommes se trouvent devant une impuissance vertigineuse et une menace récurrente : le simple fait d’écrire qu’il s’agit aussi de crimes de guerre massifs nous menace d’un procès en «antisémitisme». Tel est le sort réservé à ceux qui critiquent l’extrémisme des pouvoirs israéliens qui violent depuis des décennies tous les chapitres du droit international. Cette idée, hors de toute raison, est devenue un lieu commun. Le contexte n’aide évidemment pas. Et les observateurs attentifs ont remarqué que même la droite française, jadis qualifiée de «gaulliste», vient de rompre assez brutalement avec la doctrine de Jacques Chirac, centrée sur une solution à deux États. Notons que Dominique de Villepin, qui a reproché entre les lignes à ses anciens amis de LR de passer la question palestinienne par pertes et profits, se trouve dorénavant ultraminoritaire dans sa famille politique traditionnelle. Aujourd’hui, la ligne du parti d’Éric Ciotti, plus droitier que jamais concernant le Proche-Orient, est très proche de celle du Rassemblement national. Un changement de paradigme stupéfiant… et inquiétant. De quoi réveiller notre vigilance.

Car, pendant ce temps-là, ce qui se passe à Gaza est tellement atroce par son cheminement qu’il devient impossible de ne pas voir se dresser le spectre de l’Histoire – avec sa grande H. Le bloc-noteur, qui déteste pourtant les analogies, pense à un ami écrivain qui, cette semaine, lui disait : «Gaza, c’est le ghetto de Varsovie. On affame, on assoiffe, on prive la population de médicaments pour que tous meurent sans secours.» Et il ajoutait : «Gaza, c’est Guernica. On rase une ville sous les bombes. Hommes, femmes, enfants, vieillards, bâtiments, tout doit y passer, il faut faire table rase.» Sans commentaire.

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