« Mal nommer les choses, c’est ajouter aux
malheurs du monde », affirmait
Camus. Quand ceux-ci se déchaînent, il arrive que les mots manquent. Ou qu’ils
soient utilisés comme une arme de destruction massive du débat public. Dans des
moments si éprouvants, si dangereux, la parole politique doit remettre du sens et
de la raison, aux antipodes du spectacle affligeant donné par nombre de
responsables en France, macronistes en tête, qui refusent de voir
la complexité du monde, se pensant confortablement protégés derrière leurs
lunettes manichéennes.
La première des responsabilités commandait de ne
pas tortiller sur la condamnation des massacres abjects commis samedi
dernier par le Hamas. Et de rappeler que rien, absolument rien ne peut
justifier une telle cruauté et de telles exactions sur des civils. Comme rien,
absolument rien ne peut justifier les mots du ministre israélien de la Défense,
Yoav Gallant, qui déclarait, lundi, au sujet du siège complet de la bande de
Gaza : « Nous combattons des animaux. »
Les tueries commises par le Hamas ravivent un
débat extrêmement malsain où la nuance n’est pas permise. Le refrain vallsiste
ravageur et bas du front du « comprendre, c’est excuser » a
repris du service. La moindre critique du gouvernement d’extrême droite
israélien, le moindre rappel de la colonisation illégale, des résolutions de
l’ONU bafouées sont susceptibles d’être balayés d’un revers de main par un
procès en antisémitisme. Ces tartuffes réalisent-ils qu’ils sont ainsi en train
de nourrir dangereusement l’antisémitisme, justement ?
La gravité de la situation, le risque d’une escalade
mondiale appellent à un peu plus de sérieux et de dignité. Quand les familles
israéliennes comptent encore leurs morts ; quand les 2 millions
d’habitants de la bande de Gaza, eux aussi endeuillés, subissent un déluge de
feu, n’ont plus ni eau ni nourriture, ne parviennent pas à s’enfuir, il est
grand temps que les armes se taisent.
Le silence coupable et la lâcheté de nombreux pays
occidentaux ne sont pas pour rien dans ce bain de sang. Les diplomates
négocient les mots qui serviront à éviter les guerres. Ceux d‘« une paix
durable » ont disparu de ce conflit, qui n’a pourtant rien
d’inéluctable. « Nous avons réussi des choses impossibles, avait
confié Yitzhak Rabin à François Mitterrand. Nous avons moins bien réussi les
choses possibles. »
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire