mardi 29 août 2023

« L’enfer », l’éditorial de Stéphane Sahuc dans l’Humanité.



«Maman quand je serais grand, je voudrais pas être étudiant», chantait Renaud en 1981, en dénonçant cette élite de demain vendue à la bourgeoisie et au capital. Mais depuis Étudiant-poil aux dents, c’est l’immense majorité des jeunes qui peut prétendre au statut d’étudiant. Quasiment 80% dune classe d’âge obtient désormais un bac. Plus de jeunes avec un niveau de formation plus élevé: voilà une bonne nouvelle pour la société. Le baccalauréat, cest le premier grade universitaire, le diplôme qui ouvre la voie aux études supérieures. Et pourtant, des dizaines de milliers de jeunes ne peuvent suivre ce type d’études et des dizaines de milliers échouent et ne décrochent aucun diplôme.

Pour les réactionnaires de tout poil, c’est bien la preuve que «le niveau baisse» et que l’on «donne le bac». La réalité, c’est que, pour les jeunes issus des couches populaires et d’une partie des classes moyennes, les études postbac sont devenues quasi impossibles. Aux difficultés financières, qui obligent des dizaines de milliers d’étudiants à se salarier pour pouvoir financer des études les conduisant souvent à l’échec s’ajoute désormais l’impossibilité de se loger.

Les prix des locations explosent et représentent plus de 60% en moyenne du budget dun étudiant. De plus en plus de propriétaires choisissent de mettre leur bien en Airbnb quelques mois plutôt que de louer à l’année. Mais le vrai problème reste l’absence, le refus même, de mettre en chantier une politique de construction de logements étudiants. Et ce depuis des années. À tel point que seule une infime minorité des étudiants boursiers réussissent à obtenir une chambre universitaire. Pour les autres, les études riment avec enfer avant même d’avoir commencé. Cet enfer que connaissent nombre de leurs condisciples qui ne rentrent pas dans les critères pour obtenir des bourses. La résolution du problème du logement étudiant ne peut venir que d’une politique nationale: construction de résidences universitaires, obligation dun quota de logements étudiants dans les constructions d’immeubles neufs, encadrement des loyers, augmentation du nombre et du montant des bourses, encadrement du locatif saisonnier, allocation d’autonomie pour les jeunes… Pour des dizaines de milliers d’entre eux, c’est leur avenir qui se joue. C’est aussi celui de notre pays.

 

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