Un immense gâchis. Une casse méthodiquement
orchestrée. À rebours de l’impératif environnemental et de l’intérêt général,
Fret SNCF est menacé d’une mise à quai définitive. Si l’épopée du rail s’est
écrite par le transport de marchandises dont l’essor a fait les grandes heures
du développement industriel et commercial de la France, la stratégie mise en
œuvre conjointement par l’État et la direction de la SNCF, depuis deux décennies
a présidé à sa lente agonie.
Ouvert aux quatre vents de la libéralisation en 2006,
Fret SNCF a fait face à l’arrivée d’opérateurs privés concurrents. On nous
promettait alors l’avènement du transport par rail, la baisse des coûts et le
développement du trafic. Les chiffres attestent de l’exact contraire. De 25 % à l’aube des années 1970, la part modale du fret ferroviaire s’est
lentement érodée, atteignant péniblement les 10 % en 2021. Dans un secteur des transports responsable
de plus de 30 % des émissions nationales de gaz à effet de serre, le camion règne en maître. Et chaque train supprimé déverse des milliers de poids lourds sur les
routes. La raison poussait à construire des politiques publiques pour donner,
partout, la priorité aux transports propres. Mais la sacro-sainte logique
néolibérale a engendré l’inverse. À la concurrence s’est ajoutée la
filialisation, par la réforme ferroviaire de 2018, extrayant de fait Fret SNCF
du périmètre des services publics.
Systématiquement, les coups portés l’ont été au nom de
directives européennes dont les libéraux français au pouvoir ont pourtant été
les artisans zélés. Une fois encore, le gouvernement se cache derrière
Bruxelles pour justifier un nouvel acte de la destruction de Fret SNCF. En
face, la levée de boucliers cheminote a été immédiate et unitaire. De Paris à
Dijon, au départ du Perpignan-Rungis comme dans les gares de triage, la colère
le dispute à la détermination. Relais de revendications légitimes, les élus du
groupe GDR ont demandé l’ouverture d’une enquête parlementaire. Non, l’avenir
de Fret SNCF n’est pas un enjeu technocratique. Il est un débat national.
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