mercredi 14 juin 2023

« Erreur d’aiguillage », l’éditorial de Marion d’Allard dans l’Humanité.



Un immense gâchis. Une casse méthodiquement orchestrée. À rebours de l’impératif environnemental et de l’intérêt général, Fret SNCF est menacé d’une mise à quai définitive. Si l’épopée du rail s’est écrite par le transport de marchandises dont l’essor a fait les grandes heures du développement industriel et commercial de la France, la stratégie mise en œuvre conjointement par l’État et la direction de la SNCF, depuis deux décennies a présidé à sa lente agonie.

Ouvert aux quatre vents de la libéralisation en 2006, Fret SNCF a fait face à l’arrivée d’opérateurs privés concurrents. On nous promettait alors l’avènement du transport par rail, la baisse des coûts et le développement du trafic. Les chiffres attestent de l’exact contraire. De 25% à laube des années 1970, la part modale du fret ferroviaire s’est lentement érodée, atteignant péniblement les 10% en 2021. Dans un secteur des transports responsable de plus de 30% des émissions nationales de gaz à effet de serre, le camion règne en maître. Et chaque train supprimé déverse des milliers de poids lourds sur les routes. La raison poussait à construire des politiques publiques pour donner, partout, la priorité aux transports propres. Mais la sacro-sainte logique néolibérale a engendré l’inverse. À la concurrence s’est ajoutée la filialisation, par la réforme ferroviaire de 2018, extrayant de fait Fret SNCF du périmètre des services publics.

Systématiquement, les coups portés l’ont été au nom de directives européennes dont les libéraux français au pouvoir ont pourtant été les artisans zélés. Une fois encore, le gouvernement se cache derrière Bruxelles pour justifier un nouvel acte de la destruction de Fret SNCF. En face, la levée de boucliers cheminote a été immédiate et unitaire. De Paris à Dijon, au départ du Perpignan-Rungis comme dans les gares de triage, la colère le dispute à la détermination. Relais de revendications légitimes, les élus du groupe GDR ont demandé l’ouverture d’une enquête parlementaire. Non, l’avenir de Fret SNCF n’est pas un enjeu technocratique. Il est un débat national.

 

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