vendredi 24 mars 2023

« Réalité », l’éditorial de Laurent Mouloud dans l’Humanité.



Une fois de plus, les mots d’Emmanuel­ Macron lui sont revenus en boomerang.­ Mercredi, il dissertait au JT de 13 heures sur la tendance dans notre démocratie «à vouloir sabstraire de la réalité». Au lendemain de cette neuvième journée de mobilisation contre la réforme des retraites, le chef de l’État devrait, au moins, avoir la lucidité de s’appliquer ses propres analyses. La «réa­lité», cest lui qui ne veut pas la voir. Et sûrement pas ces millions de Français, représentant une profonde volonté générale, descendus à nouveau dans la rue ce jeudi avec une détermination exemplaire. Face à un président qui ne peut qu’opposer déni, mépris et court-­circuitages démocratiques, la légitimité est définitivement de leur côté.

Le contraste est désormais saisissant. D’un côté, une unité syndicale sans faille à l’appui d’une opinion publique largement acquise. De l’autre, un Emmanuel Macron isolé et sans autre proposition que de souffler sur les braises en rêvant d’un pourrissement du mouvement. La journée d’hier, et le souci répété des leaders syndicaux de mener des actions non violentes, montre que personne, espérons-le, ne compte lui faire ce cadeau. Au bout d’un an de mandat à peine, le chef de l’État semble déjà en fin de règne. Incapable d’apaiser et de donner un cap clair à son mandat autre que celui d’un néolibéralisme rance, à courte vue, imposé à coups d’alliances politiques de circonstance.

En imaginant que la mobilisation sociale va s’éteindre comme par magie, la Macronie se voile la face. Derrière la contestation de la réforme des retraites, c’est bien l’incapacité du chef de l’État à défendre et à faire vivre l’intérêt général – seul à même de fédérer les Français – qui est pointée. À l’entreprise de déconstruction du collectif à laquelle s’astreint Emmanuel Macron depuis 2017, les manifestants opposent la force du commun. Il le sait. Sa tentative de discréditer le mouvement en le qualifiant de «foule» désincarnée et irrationnelle témoigne avant tout de ses craintes. Et d’une volonté inquiétante de «sabstraire de toute réalité».

 

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