L’arme nucléaire n’est pas qu’une bombe susceptible
d’éradiquer l’humanité. C’est également une industrie de mort coûteuse à
laquelle les États, aveuglés par la promesse d’une sécurité par la menace,
consacrent un budget en pleine expansion. Le dernier rapport de l’Ican, que
nous dévoilons dans ces pages, offre à ce titre un panorama des plus
inquiétants. Avec ce chiffre impressionnant : les neuf pays dotés de l’arme suprême ont dépensé près de 78,8 milliards d’euros en
2022 pour cet arsenal de destruction massive, soit près de 150 000 euros par minute… Une somme qui grimpe d’année en année. Au même rythme que la menace qui
l’accompagne.
C’est le prix pour assurer la paix, répètent en chœur
les promoteurs de la fameuse dissuasion nucléaire. Sauf que l’argument, qui a
fait florès durant la guerre froide, ne tient plus aujourd’hui. L’envolée des
budgets d’armement nucléaire ne témoigne pas d’un apaisement entre nations qui
se toisent mais d’une réelle escalade du danger. Plus encore depuis la guerre
en Ukraine, ce n’est pas de dissuasion dont parlent ouvertement les détenteurs
des principaux arsenaux – États-Unis et Russie – mais bien
d’utilisation sur les champs de bataille. Avec l’idée, au mépris des traités
internationaux, de transformer ces armes stratégiques en armes
conventionnelles, moins remplies en charge explosive, afin de frapper une ligne
de front ou détruire «juste» une ville… Un mini-nucléaire, en somme, qui
rendrait acceptable son utilisation, inimaginable auparavant.
Cet engrenage menace le monde comme une épée de
Damoclès. Et devrait pousser, au-delà des belles déclarations de principe, les
États détenteurs de la bombe, comme la France, à soutenir le traité
d’interdiction des armes nucléaires. Malheureusement, les choix budgétaires,
influencés par le poids des lobbys militaro-industriels, montrent l’inverse.
Les États-Unis ont signé des contrats avec des entreprises de ce secteur
jusqu’en 2040. Quant au gouvernement d’Emmanuel Macron, il vient de voter une
augmentation de 50 % du budget de la dissuasion d’ici à 2030. Des
dizaines de milliards détournés de la santé, de l’éducation, de la lutte contre la faim et de l’aide au
développement. Des secteurs qui pourraient pourtant, eux, assurer une vraie
paix. Et non pas cette sécurité par la terreur.
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