mardi 21 mars 2023

« Générations », l’éditorial de Stéphane Sahuc dans l’Humanité.



LES ÉTUDIANTS QUI SE MOBILISENT AUJOURD’HUI SONT À L’IMAGE DE L’ENSEMBLE DE LA JEUNESSE DANS SA DIVERSITÉ.

L’histoire fait quelquefois des clins d’œil. Que la mobilisation étudiante et de la jeunesse prenne de l’ampleur en ce début de printemps ne va pas manquer de rappeler à certains un autre 22 mars. Certes, une partie de la génération du printemps étudiant contre la société gaullienne est celle qui, aujourd’hui, soutient le plus fortement la réforme des retraites et Emmanuel Macron. Mais il faut bien reconnaître que cette génération de mars 2023 qui met en cause la «start-up nation», qui refuse le mythe du «winner» et du premier de cordée, a quelques points communs avec celle qui voulait en finir avec une société étouffante et corsetée. Des anciens d’ultragauche se sont reconvertis en libéraux bon teint à tendance réactionnaire, les fameux boomers, mais l’envie qui traversait cette jeunesse de renverser la table n’est pas réductible à ceux-là. Tout comme cette génération qui se lève contre la retraite à 64 ans n’est pas réductible aux influenceurs qui font leur beurre sur les réseaux sociaux.

À la différence de celle d’il y a plus d’un demi-siècle, la génération d’étudiants qui se mobilise aujourd’hui est à l’image de l’ensemble de la jeunesse dans sa diversité. Elle a d’ailleurs beaucoup à voir avec une autre génération: celle qui sest soulevée dans les banlieues en 2005. Celle de leurs parents, donc. Une génération qui a subi latomisation et la précarisation du travail, et pour laquelle la grève est souvent financièrement impossible. Une génération qui a servi de terrain d’expérimentation aux violences policières. Après les quartiers populaires et la France des ronds-points, c’est au tour du mouvement contre les retraites de faire les frais de cette stratégie qui repose sur le triptyque nasses, gaz lacrymogène, arrestations musclées.

Si ce recours à la violence s’opère maintenant, c’est que l’irruption de la jeunesse dans ce mouvement qui se durcit sans se rabougrir inquiète le pouvoir, alors qu’il misait sur un effondrement après l’adoption de sa réforme par le 49.3. À défaut de gagner l’opinion, le gouvernement tente de lui faire peur. Après avoir agité le spectre du désordre et du chaos à l’Assemblée, il compte bien faire croire que celui-ci est désormais dans la rue.

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