L’ombre de
Nicolas Sarkozy ne plane pas que sur les financements frauduleux de campagnes
électorales. Son célèbre populisme pénal – un fait divers, une loi – inspire
encore la Macronie et la droite. À cet égard, la proposition de loi portée par
Gabriel Attal, débattue actuellement au Sénat et visant à « restaurer
l’autorité » de la justice des mineurs, est un modèle du genre.
Rhétorique martiale, manipulation des faits, mesures inapplicables et
contre-productives… Tout y est. À la grande joie des Retailleau, Darmanin et
autres Le Pen qui font leur miel électoral de ce sentiment diffus d’insécurité.
Mais au grand désespoir des professionnels du monde judiciaire et de l’enfance,
pris en otage de cette sempiternelle instrumentalisation.
« Restaurer l’autorité » sous-entend qu’elle aurait disparu et que la délinquance exploserait. Or
c’est faux. Entre 2016 et 2024, le nombre de mineurs en infraction a reculé de
16 %. Leur quota dans les personnes mises en cause est passé de 17 %
à 12 % sur la même période. Le travail de la justice ? Son taux de
réponse pénale est aujourd’hui de 93 % et le nombre de mineurs incarcérés
(900) est au plus haut en 2024.
Où est le
« laxisme » maintes fois brandi ? La seule courbe en hausse est
celle des actes les plus violents chez les mineurs. Nourris par la
multiplication des règlements de comptes sur fond de trafic de stupéfiants, ces
faits restent rares (2 095 en 2023) mais sont très médiatisés. Et servent
de prétexte bien pratique à un discours sécuritaire qui hystérise le sujet, sape
la philosophie éducative de la justice des mineurs et escamote son manque de
moyens.
Ce petit jeu
politicien ne rend service ni à la sécurité des Français ni à la jeunesse. Les
comparutions immédiates de gamins déstructurés, en plus d’aller à l’encontre de
la Convention internationale des droits de l’enfant, ne régleront rien sur le
fond. Pas plus que les amendes infligées à des parents dépassés.
La répression,
seule, est vaine sans un accompagnement de ces jeunes. Encore une fois, la
réalité des chiffres le démontre : 85 % des primo-délinquants qui ont
pu être suivis par la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) n’ont plus
jamais eu affaire à la justice dans leur vie. Et pourtant, c’est à la PJJ qu’il
manque actuellement 180 postes et où 4 200 mesures éducatives sont en
attente. Un laxisme, bien réel cette fois, qui n’est jamais dénoncé par les
zélateurs du populisme pénal.
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