La sortie au cinéma de Napoléon fait couler beaucoup
d’encre. L’Humanité magazine consacre d’ailleurs sa prochaine
une au « mythe Napoléon ». Pour en finir. Car oui, il faut
s’attaquer à l’image de Napoléon en France. Si la légende commence à être
construite par Napoléon lui-même puis par les anti - Restauration et
Louis-Napoléon Bonaparte, la figure « positive » de l’empereur s’est
inscrite dans l’inconscient collectif français sous l’impulsion de la IIIe République.
Pour cristalliser l’amour de la patrie, le nouveau pouvoir républicain
construit un « roman national » dans lequel il exalte de grandes
figures symboles de l’esprit français. L’école obligatoire à travers les fameux
manuels d’Ernest Lavisse se charge de transmettre à tous les petits Français,
soldats du lendemain, ce récit d’une glorieuse France éternelle. La mythologie
napoléonienne est particulièrement utile quand il s’agit d’aborder la rivalité
coloniale avec la Grande-Bretagne ou de faire face à l’ennemi allemand.
Et cent cinquante ans plus tard, à la boutique des Invalides, déjà
toute dédiée à la « gloire de l’Empereur », on trouve le Lavisse
« complété par Dimitri Casali », essayiste réactionnaire habitué des
plateaux de Bolloré. Plus largement, cette façon de faire l’Histoire, bien que
contestée par des générations d’historiens, a plateau ouvert et reste prégnante
dans notre société.
Et pour cause, c’est sur la figure du « sauveur », sur l’attente
de « l’homme providentiel », que se structure la vie politique de la
société française. Seules la IIIe République et l’éphémère IVe ont
évité le « bonapartisme », et parfois de justesse, comme le
prouve l’aventure du général Boulanger.
Depuis 1852, la France a vécu plus longtemps sous des régimes avatars du
bonapartisme que sous des régimes parlementaires : du second Empire
au gaullisme, mais également le pétainisme. Lors de son élection en 2017,
Macron fait le choix d’une célébration au Louvre, demeure des rois, devant la
pyramide, référence subliminale à la campagne d’Égypte du futur empereur
Napoléon, avec comme objectif de l’inscrire dans la continuité
des sacres.
Attaquer le mythe Napoléon, c’est attaquer le socle du pouvoir personnel et
contre-révolutionnaire sur lequel repose la Ve République.
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