lundi 21 août 2023

« Impunité », l’éditorial de Laurent Mouloud dans l’Humanité.



L’Arabie saoudite, terre de contraste. Côté vitrine et flonflons, il y a les milliards dépensés pour attirer Neymar et autres stars du foot, censés redorer l’image de la pétromonarchie. Côté coulisses, la violence sans limite d’une tyrannie. Les faits révélés hier dans un rapport d’Human Rights Watch (HRW) sont glaçants. Selon l’association, plusieurs centaines de migrants éthiopiens auraient été tués par les gardes-frontières saoudiens, entre mars 2022 et juin 2023, alors qu’ils tentaient de pénétrer sur le territoire, via la frontière avec le Yémen. Les mots de Nadia Hardman, spécialiste des migrations à HRW, sont terribles. Elle parle de meurtres «généralisés et systématiques», qui concerneraient au minimum 655 personnes, «peut-être des milliers», elle évoque des champs d’extermination où des corps auraient été vus éparpillés à flanc de colline… Des accusations basées sur une multitude de témoignages. Mais aussi des images satellites, des vidéos, des photos. Accablant.

L’horreur ainsi décrite jette, s’il le fallait encore, une lumière crue sur la brutalité de ce régime politique. Sous la férule du prince héritier, Mohammed Ben Salmane, le pouvoir harcèle, voire exécute, tout opposant politique, intellectuel, féministe ou encore militant des droits de l’homme. Évidemment, cette répression s’exerce aussi à l’égard des immigrés. Des parias, exploités en masse, exposés parfois aux tortures, aux viols. Et, donc, aux exécutions sommaires lorsqu’ils tentent de venir par une voie clandestine.

Ce rapport de HRW le montre une nouvelle fois: laffichage de modernité de la dynastie saoudienne, complaisamment relayé par nombre de naïfs, cyniques ou cupides, nest quun leurre. Les faits dénoncés relèvent potentiellement du crime contre lhumanité. Et appellent louverture d’une enquête sous l’égide de l’ONU. Ils interrogent aussi la responsabilité des puissances occidentales. Dont la France, qui a fait de l’Arabie saoudite un allié régional et son premier client en achat d’armes. Cette compromission, dont on retrouve les traces sanglantes dans le conflit au Yémen, nourrit l’impunité d’un régime dont on sait qu’il ne recule devant aucune tuerie.

 

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