mercredi 2 juillet 2025

« On achève bien les hôpitaux »n l’éditorial de Stéphane Sahuc.



Combien faudra-t-il de morts ? À partir de combien de personnes qui auraient pu être sauvées et qui ne l’ont pas été, estimera-t-on qu’il y a quelque chose de pourri dans notre système de santé ? En réalité, c’est le droit aux soins que les pouvoirs publics laissent crever au nom de la sacro-sainte « maîtrise des dépenses de santé ».

Comme pour nombre de secteurs, la santé et particulièrement l’hôpital public et les urgences subissent le processus infernal d’un désengagement financier. Cela conduit à une situation très dégradée qui est utilisée ensuite comme argument pour fermer des services ou des sites. Les hôpitaux doivent être gérés comme des entreprises afin de gagner en efficacité et coûter moins cher, voilà le credo. En conséquence, depuis plus de vingt ans, les hôpitaux n’ont plus eu accès aux emprunts de la Caisse des dépôts.

C’est la fin des intérêts très bas et des délais de remboursement très longs. Pour financer des travaux ou les achats de matériels de pointe, il faut désormais emprunter auprès des banques commerciales. Et elles vont se gaver, creusant au passage la fameuse dette de l’hôpital… et justifiant par la même occasion des mesures d’économies qui aggravent encore la situation, entraînent des fermetures de lits, de services, de sites, accélèrent la formation des déserts médicaux et surchargent de fait les hôpitaux et les urgences encore en activité. Cet engrenage catastrophique se traduit concrètement par la mise en danger de patients. L’engagement des personnels hospitaliers ne suffit plus à rattraper les défaillances structurelles.

Refusant de s’attaquer à ces problèmes de fond, le pouvoir cherche « des trucs » : obliger les patients à appeler le centre 15 avant d’aller aux urgences, abuser des auxiliaires médicaux et des secouristes. Bref, limiter le plus possible la possibilité d’accéder aux services d’urgences et d’être vu par un médecin. Aujourd’hui, le bilan de cette gestion comptable et libérale du système de santé est de 1 500 à 2 000 « morts évitables » par an, comme les appellent les médecins. Alors combien de morts faudra-t-il ? 3 000, 5 000, 10 000 ? Avec les canicules à répétition, le chiffre pourrait atteindre des sommets.

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