jeudi 3 juillet 2025

« Après la commission d’enquête Bétharram, le devoir d’agir », l’éditorial de Cédric Clérin.



Voici un rapport qui doit faire date. Les conclusions de la commission parlementaire dite Bétharram sont de salut public. D’abord parce qu’elles ont permis de porter à la lumière des voix longtemps étouffées : celles des victimes. « On parle de libération de la parole, mais beaucoup de gens parlaient ! (…) Ce qui nous unit tous, c’est le manque de courage des adultes qui ont vu et n’ont rien fait », a ainsi confié l’une d’elles à la commission. On ne parle pas ici de simples dysfonctionnements, mais de violences physiques, de sévices sexuels, d’actes de torture, parfois assimilables à de l’esclavage, sur des enfants. Un scandale d’une ampleur rare.

Déjà 250 plaintes sont en cours d’instruction. D’autres suivront. C’est là une première victoire – mais amère. Car, pour nombre d’enfants ayant subi l’innommable, la justice restera hors d’atteinte si rien ne change en raison de la prescription. L’omerta des directions d’établissement, conjuguée au silence de l’État, a causé des ravages irréparables.

Un autre mérite du rapport est de lever le voile sur un système où l’enseignement privé catholique, épicentre de la majorité des cas révélés, jouit d’une impunité sidérante. Religion, intérêts privés et intérêt général n’ont jamais fait bon ménage : aucun contrôle des dérives connues, mais tues jusque dans les plus hautes sphères. Une forme de sabotage de l’intérieur de la République.

Il est frappant de constater que les mêmes responsables politiques qui se drapent dans les mots de « séparatisme », de « laïcité » ou de « défense républicaine » sont ceux qui, pendant des décennies, ont laissé faire. Et qui, aujourd’hui encore, couvrent des cas comme celui de l’école Stanislas, toujours en infraction avec ses obligations. Les recommandations du rapport doivent désormais être suivies d’effets.

Sans cela, le système continuera à fonctionner selon les lois du silence, de la violence et des idées d’Ancien Régime. Mais rien n’est gagné. Le déni continue jusqu’à Matignon. La moitié des députés RN s’est abstenue sur les conclusions du rapport. Quand il s’agit de banaliser la violence et de piétiner les principes républicains, ils ne sont jamais bien loin.

 

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