PATIENTS : À bas
bruit, la question de la « fin de
vie » s’est donc de nouveau invitée au Parlement, sachant que l’ancien projet de loi, l’an dernier,
avait été percuté par la dissolution. En début de semaine, à l’Assemblée
nationale, les députés ont commencé à aborder le cœur du débat avec l’examen de
l’article 4 du texte actuel, qui fixe les conditions d’accès à l’aide à
mourir. Autrement dit, le thème le plus clivant de la proposition de loi sur le
suicide assisté et l’euthanasie.
Autant ne pas
le cacher, et au-delà des « pour » et des « contre », la
problématique épineuse de l’éligibilité des patients à une mort provoquée
divise les partisans même de ce nouveau droit. Doit-il uniquement concerner des
patients proches de la mort ? Et les malades qui ont encore plusieurs mois
à vivre, voire plusieurs années, devraient-ils avoir accès à un produit
létal ? Résumons.
Il y a d’un
côté les défenseurs d’un droit « restrictif »,
qui plaident pour appliquer des critères plus « stricts »
à l’aide à mourir. Il y a d’un autre côté les partisans d’un droit à mourir,
plus axés sur la demande du patient et sa perception de la douleur, qui
bataillent pour élargir davantage le texte. Enfin, il y a les opposants
radicaux, qui jugent qu’aucun critère ne saurait véritablement restreindre
l’aide à mourir.
La loi et la
« fin de vie »…
CONVICTIONS : Face
aux circonstances des fins de vie, tout individu est un cas particulier. Ceux
qui ont connu la disparition d’un proche sur un lit d’hôpital savent que, sur
ce sujet, « pacifier le débat », l’objectif affiché par Mac Macron
II l’an dernier, n’a rien d’une évidence. L’aide à mourir peut-elle être un
geste de « fraternité », terme revendiqué par l’hôte du
Palais ?
Vertigineuse
question, autour de laquelle se croisent comme rarement convictions
personnelles et enjeux politiques collectifs qui touchent à l’intimité de
chaque famille, secouent les convictions politiques ou religieuses de chacun,
remue des considérations éthiques ou philosophiques, sans jamais atténuer les
peurs ni effacer la mémoire d’expériences douloureuses.
Au-delà de ses
différences et de ses convictions, en pleine conscience, reconnaissons que la
rédaction du texte qui sortira de l’Assemblée nationale aura un impact
très concret. Dès lors, chaque mot a une importance cruciale, susceptible
d’entraîner un droit à la mort assistée pour des centaines ou des milliers de
personnes. Parmi les échanges : la définition de la « phase
avancée ou terminale » de l’affection des patients. Cette condition en
complète d’autres : être âgé d’au moins 18 ans, être de nationalité
française, être atteint d’une « affection grave et incurable » et
« présenter une souffrance physique ou psychologique liée à cette
affection ».
Selon la nature
des débats, l’aide à mourir pourrait très bien devenir une « réponse en
cours de maladie, bien avant la fin de vie », s’est ému, par exemple,
le député communiste Stéphane Peu. Celui-ci redoute en effet que, « dans
les moments de grande désespérance », la possibilité d’être soigné
soit « contrebalancée » par la loi sur l’aide à mourir. Quoi
qu’il advienne, il reviendra aux médecins de trancher, malgré le serment
d’Hippocrate qui leur interdit de « donner la mort »…
DIGNE : L’évocation par Mac Macron
II d’un possible référendum sur le sujet en cas d’enlisement de la loi a
évidemment échauffé les esprits. En l’état, n’excluons pas le vote (prévu le
27 mai) d’un texte beaucoup plus permissif que ce qui était présenté au
départ. Reposons l’une des questions centrales : aurions-nous besoin d’une
nouvelle loi si les soins palliatifs étaient à la hauteur d’un pays comme la
France, alors que nos hôpitaux restent dramatiquement sous-dotés ?
La Cour des
comptes estime ainsi que les besoins en soins palliatifs ne sont assurés qu’à
hauteur de 50 % dans notre pays, ce qui, de fait, a rendu inopérante la
loi Claeys-Leonetti pour une fin de vie digne et apaisée. Jusqu’à nos jours, la
France avait toujours échappé à la demande d’assistance au suicide « par
défaut », sans jamais faire porter sur les plus fragiles cette injonction
sociale insupportable : ma vie vaut-elle la peine d’être vécue, puisque je
suis un « poids » pour ma famille et la société ?
Sans parler des
autres interrogations multiples. Donner la mort peut-il devenir un droit
civique ? Accorder le droit de donner la mort constitue-t-il une rupture
anthropologique ? L’État doit-il être mêlé, d’une manière ou d’une autre,
à la mort d’une personne ?
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