Au pouvoir depuis un quart de siècle, Recep Tayyip Erdogan se rêve en padichah, en sultan des sultans, « l’ombre de Dieu sur terre », comme le dit une lettre de Soliman le Magnifique qu’il aime à citer. Le président turc se croit monarque de droit divin, mais il n’est qu’un geôlier.
Il a fait de
son pays une vaste prison où environ 80 000 détenus politiques sont
arbitrairement privés de liberté, en vertu d’un arsenal
« antiterroriste » qui criminalise toutes les voix libres, quand
l’impunité est garantie aux mercenaires, aux affairistes, aux corrompus. Depuis
le début de la révolte contre
l’arrestation du maire d’Istanbul, Ekrem Imamoglu, injustement empêché de représenter son parti, le CHP
(kémaliste), à l’élection présidentielle, 1 900 manifestants ont été
arrêtés. Les protestations, les plus fortes depuis le soulèvement de Gezi
Park en 2013, se
poursuivent pourtant dans tout le pays ; elles défient la répression, la
censure, le verrouillage des réseaux sociaux, les canons à eau et le gaz au
poivre.
Avec son parti
islamiste, l’AKP, Erdogan a installé en Turquie un régime autoritaire,
liberticide, prédateur. Ses choix économiques laissent les classes populaires
exsangues. Ses fantasmes néo-ottomans sèment, au Moyen Orient, en Méditerranée,
la déstabilisation. Il a fait du harcèlement
judiciaire des démocrates une arme politique. Il martyrise les Kurdes à l’intérieur comme à l’extérieur, avec ses bombardements continus en territoires
syrien et irakien, alors que nul
ne sait pour l’heure quelle réponse il entend apporter à l’offre de paix du chef
du PKK, Abdullah Öcalan.
Depuis la
défaite de son camp aux élections municipales l’année dernière, il destitue un à un les
maires qui s’opposent à lui. Il ne peut se
représenter à l’élection présidentielle, prévue en 2028. À moins d’un coup
d’État constitutionnel dont l’incarcération de son principal rival pourrait
être le prologue.
En recevant
Benyamin Netanyahou dans le bureau Ovale, le 7 avril, Donald Trump a
proposé de jouer les médiateurs pour éviter toute confrontation entre Ankara et
Tel-Aviv sur le théâtre syrien. « J’ai de bonnes relations avec un
homme nommé Erdogan. (…) Il se trouve que je l’aime bien et qu’il m’aime
bien. » Les fascistes savent reconnaître leurs amis.
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