Laurence
Parisot ne s’y est pas trompée : « Tiens, le premier ministre
reprend des extraits de mes discours en tant que présidente du Medef », s’est
amusée l’ancienne patronne des patrons, mardi 14 janvier, à l’écoute de la feuille de route
présentée par François Bayrou aux députés. Et tout y était, en effet, dans la rhétorique comme sur les choix
politiques.
Le chef du
gouvernement n’a pas eu le moindre mot sur les urgences dont le pays
s’alarme : salaires bloqués, pouvoir d’achat comprimé, emplois détruits ou
menacés par dizaines de milliers, services publics au régime sec. Loin du réel,
c’est l’interminable et assommante litanie des obsessions ultralibérales
ruminées depuis ses années giscardiennes qui tramait son discours de politique
générale.
Sur le déficit
public d’abord, qu’il entend ramener, comme l’exige Bruxelles, à 3 % du
PIB en 2029 par la contention des dépenses sociales. Il impute d’ailleurs
l’envolée de la dette sous les mandats d’Emmanuel Macron aux pensions versées
aux retraités, dans un ulcérant tour de prestidigitateur escamotant les cadeaux
fiscaux ruineux offerts aux ultrariches et aux multinationales.
Ces dernières « font
honneur à la France et contribuent à sa richesse », a-t-il affecté, en
jurant de les prémunir contre des « augmentations exponentielles
d’impôts et de charges ». Pas touche au grisbi : les grands
groupes du CAC 40, qui ont versé le montant record
de 73 milliards d’euros de dividendes à leurs actionnaires en 2024, et leur promettent cette année
81 milliards, ne sont pas concernés par les « efforts »
que l’exécutif exige des salariés, des chômeurs, d’une jeunesse précarisée.
Quant à la
contre-réforme des retraites, dont le passage en force, en 2023, nourrit une
grave crise politique, elle ne sera ni abrogée, ni suspendue, ni gelée. Son
sort est remis entre les mains d’un « conclave » où le patronat fera
obstacle à toute réforme alternative mobilisant, comme le suggèrent les
syndicats, des financements nouveaux. François Bayrou n’a pas donné à la gauche
le moindre gage. La procédure choisie pour remettre le budget sur le métier
cadenasse les arbitrages imposés par le gouvernement Barnier. Sous les airs de
l’homme de dialogue soucieux du pluralisme, le premier ministre verrouille
tout. En ligne avec la mission que lui a confiée l’Élysée.
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