Les voilà bien silencieux depuis quelque temps, au moins sur ce point, tous
nos penseurs libéraux qui ne juraient que par Alexis de Tocqueville et son
célèbre essai De la démocratie en Amérique. Lequel écrivait dans sa
préface : « Suivant que nous aurons la liberté démocratique
ou la tyrannie démocratique, la destinée du monde sera différente. (…) Or, ce
problème que nous venons seulement de poser, l’Amérique l’a résolu il y a plus
de soixante ans. » Trêve d’ironie. Quoi qu’il advienne désormais,
on a le sentiment de voir sortir de la séquence ouverte par la défaite de
Trump, il y a quatre ans, suivie de l’assaut du Capitole, une démocratie en lambeaux.
Le mensonge éhonté érigé en système et gobé sans sourciller par des
millions d’hommes et de femmes, les vérités « alternatives » et les
fake news devenues du pain quotidien, la fabrication d’informations insensées
par l’intelligence artificielle, les milliards engagés dans la campagne de la
candidate comme du candidat… tout cela se passe aux yeux du monde et il ne fait
aucun doute que, dans de multiples pays y compris en Europe, ça suscite déjà
des vocations.
Cette élection est un tournant. Nous entrons dans une période sombre de la
démocratie, alors même que le reste du monde, pays totalitaires ou non, se
dresse face au modèle qui était jusqu’alors celui de « l’Occident ».
La première puissance mondiale est en crise interne au point qu’on a pu
parler d’un risque de guerre civile. Mais cette crise nous concerne. Non
seulement parce que les orientations qui vont être prises pèseront sur
l’économie mondiale, l’Europe et la France, comme sur l’environnement, les
visions que l’on peut avoir de l’avenir, mais aussi parce que les États-Unis
jouent gros.
Leur dette, dont il fut peu parlé pendant la campagne, de
35 000 milliards de dollars, est abyssale. Elle est possible parce
qu’ils sont la première puissance économique et militaire sur la planète, et
que le dollar y fait foi et loi. Les tensions avec la Chine ne sont pas que
commerciales. Pour eux, l’enjeu n’est pas en soi d’être « les gendarmes »
du monde, mais garder la première place est une question existentielle à
laquelle, de toute manière, ils vont devoir répondre.
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