dimanche 10 juillet 2022

Parlons "Réformes"



Tout ce que la France compte d’adeptes du libéralisme entonne le même refrain : La France a été, ces deux dernières décennies, incapable de se rassembler pour « réformer ». Plusieurs articles et éditoriaux y ont été consacrés. En voici quelques passages « délicieux ». " C’est un revers majeur, pire, un aveu de faiblesse, pour tous ceux qui nous gouvernent depuis plus de vingt ans. Mais c’est surtout la démonstration consternante qu’il était impossible en France de réunir des majorités d’idées, constituées d’élus de gauche, de droite et du centre pour faire AVANCER DES RÉFORMES. Ce qui aurait été un marqueur symbolique fort a été balayé par une alliance des conservatismes de droite et de gauche.

« Réformes », justement arrêtons-nous sur ce terme utilisé hier par SARKOZY, par le couple HOLLANDE-VALLS et depuis plus de cinq ans par Macron et les siens, jusqu’à l’overdose. Si l’on s’en tient à la définition du dictionnaire : "la réforme" est un changement dont le but est d’apporter des améliorations ». En règle générale ce terme était utilisé pour donner à son objet une marque progressiste. Pendant des décennies, en gros à la fin du XIXème siècle jusqu’à la présente crise du capitalisme, au sein du mouvement ouvrier ou en marge de celui-ci, le mot réforme a désigné des transformations des rapports capitalistes de production, de propriété ou de classes destinées à améliorer la condition des travailleurs salariés en général. En dépit des illusions réformistes, de telles réformes ont constitué de réels progrès pour les salariés. Aujourd’hui au contraire, lorsque idéologues et politiciens néolibéraux parlent de nécessaires « réformes » à entreprendre, ils entendent remettre en cause non seulement les conquêtes des travailleurs, fruits de leurs luttes antérieures, mais encore le principe même selon lequel le sort des travailleurs pourrait s’améliorer à la faveur de la transformation des rapports capitalistes de production. C’est ainsi que la « réforme des retraites » conduite ces dernières années, qui serait achevée par les annonces du monarque, a généré, en même temps qu’un allongement de la durée du travail, une dégradation du pouvoir d’achat des retraités au cours des prochaines décennies, en faisant réapparaître le spectre de la vieillesse indigente. Dans le discours libéral « la Réforme c’est la contre-Réforme » !

Les réformes structurelles néolibérales sont facilitées par l’utilisation d’euphémismes qui laissent à penser qu’il s’agit de réformes marginales. Ainsi les politiques d’austérité se transforment en maîtrise des finances publiques. Les termes implicites sont également utilisés pour favoriser la mise en place de politiques néolibérales. Ainsi l’utilisation du mot assainissement pour évoquer les finances publiques laisse à penser « qu’elles ne sont pas saines ». La mise à la diète des fonctionnaires sous-entend que « ces derniers vivent dans l’opulence ».
La modération salariale renvoie à la même idée concernant les salariés. Dans le même esprit les politiques de privatisation consistent à faire « respirer » le secteur public et les politiques de démantèlement du code du travail consistent à « s’attaquer aux rigidités de ce dernier ». Le rapport à l’emploi est également décrit d’une manière particulière, puisqu’il s’agit de « décrocher un emploi », comme s’il s’agissait d’une chance exceptionnelle. Pour y parvenir, il est demandé d’être « flexible », c'est-à-dire de s’adapter aux contraintes horaires ou géographiques de son employeur, voir « agile », en démontrant par exemple sa capacité à prendre un emploi de 2 mois à Riga ou à Lisbonne ! Un plan de licenciement est devenu un « plan social » ou un « plan de sauvegarde de l’emploi ». Le démantèlement du système de protection sociale devient un « plan de modernisation et de sauvegarde de ce système ». Le terme de compétitivité s’insère dans de nombreux domaines tels que les hôpitaux, les universités. Les usagers des services publics deviennent des « clients ». La confrontation patrons-syndicats est également biaisée puisqu’au lieu de la considérer comme un rapport de force, c'est-à-dire une lutte de classes, la novlangue néolibérale utilise des termes tels que partenaires sociaux ou dialogue social, qui laissent à penser que les « partenaires » ont les mêmes intérêts.

A l’arrivée on veut déposséder le peuple de ses mots pour que non seulement il ne puisse plus intervenir sur son avenir mais qu’en plus il ne soit plus en capacité de comprendre. Les néolibéraux n’ont qu’un objectif : celui de faire disparaître l’idée que le peuple peut prendre en main son avenir. Cette prépondérance du discours néolibéral ne peut s’accommoder de la disparition de termes tels que capital, capitalisme, exploitation, communisme. Cette terminologie doit, plus que jamais, servir de langage, d’outils d’analyse, de signes de reconnaissance aux protagonistes des luttes anti capitalistes. Il est absolument nécessaire de combattre cette opacité volontairement entretenue pour que le peuple se désintéresse de son propre sort. Cela fait partie intégrante de la lutte des classes !

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