mercredi 15 juin 2022

À l'aube !



J’aime la magie des aubes d’été, quand je découvre la lumière qui vient de naître et que chaque fois monte en moi l’impression que le monde est neuf, qu’il m’attend pour m’offrir ce qu’il possède de meilleur. J’ouvre la fenêtre pour ressentir la caresse des rayons du soleil, pour écouter les oiseaux s’émerveiller d’être en vie. Les matins de pêche, je quitte la maison alors que la nuit rôde. Je décampe vers le lac en me hâtant afin d’arriver avant le jour. Une fois à destination, je le devine à une pâleur qui l’annonce. Ce n’est pas l’aube, c’est l’aurore, l’instant magique. La lèvre lumineuse du ciel s’agrandit doucement, déborde jusqu’à faire pâlir l’ombre étendue sur les prés et les champs. L’eau se met à fumer, et, très vite, à pétiller. La lumière grignote l’ombre. L’aube est là. De longues nappes de brume s’accrochent aux rives puis montent lentement et se dissolvent enfin dans l’air qui resplendit dans un foyer d’argent. Les poissons gobent les éphémères, morts pendant la nuit. Je m’assois et contemple le monde né de cette aube si belle, où des éboulis de silence soulignent le murmure de l’eau. J’attends, j’écoute. Des chevaux hennissent dans les prés là-bas, derrière un rideau de frênes. Des coqs s’interrogent dans des fermes isolées que je n’aperçois pas. La lumière peu à peu tourne de l’argent à l’or. Je regarde, j’accueille la vie en train de naître. Incapable de me lever, de me soustraire à la beauté de la lumière, jusqu’à ce que le soleil chauffe trop. Alors, seulement, je commence à pêcher, puisque je suis venu pour ça. J’attends, le cœur battant, que le poisson se manifeste. Après plusieurs lancers, la touche enfin ! J’ai ferré trop tôt. Mon instinct m’a fait deviner l’ombre du poisson, le petit remous qui s’est dessiné sous l’appât. Le soleil surgit et tout s’embrase : l’eau, les arbres, les rives et le ciel. Les poissons ont achevé leur festin. Je n’ai rien pris. Je me suis mis à pêcher trop tard.

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