lundi 7 juillet 2025

« Droit aux vacances : ce révélateur des inégalités de classe », l’éditorial de Cathy Dos Santos.



À la Libération, le Conseil national de la Résistance érigeait les vacances en droit, dans le même esprit qui avait prévalu à l’instauration des congés payés conquis de haute lutte en 1936 avec le Front populaire. Quatre-vingts ans plus tard, ce droit est en recul, relégué aux oubliettes par les pouvoirs publics. Il avait pourtant été inscrit dans la loi contre l’exclusion de 1998, sous l’impulsion de la communiste et ancienne secrétaire d’État au Tourisme Michelle Demessine, car vecteur d’épanouissement et d’inclusion. Aujourd’hui, on ne compte plus les enfants qui n’ont jamais vu la mer ou la montagne « pour de vrai ». Près de la moitié des Français ne partent pas en vacances. Ces statistiques s’affolent chez les ouvriers et les employés avec un taux qui monte à 50 %. Quant aux allocataires du RSA, ils sont 70 % à vivre reclus chez eux.

L’absence de vacances est un révélateur des inégalités sociales. La précarité, le chômage, la faiblesse des salaires, l’inflation en constante augmentation ont conduit des familles à rogner sur le budget des vacances, considérées comme « non essentielles » à l’heure où les factures s’accumulent. Cette assignation à résidence est un terrible marqueur de classe. Elle est source de tensions intrafamiliales, de stress et de repli social. Elle fait des ravages chez les plus petits, car elle aiguise les différences et alimente la dévalorisation de soi ; elle plombe la curiosité et l’éveil.

Le droit aux vacances n’est pas qu’une affaire personnelle ni un supplément d’âme. Il est également lié aux attaques qu’il subit : le prix des colonies a explosé, les aides sont insuffisantes et souvent méconnues, les structures des collectivités locales ont presque toutes disparu du fait de l’austérité auxquelles elles sont soumises, les comités d’entreprise ont vu leur marge de manœuvre se réduire drastiquement, etc.

L’État porte une responsabilité dans ce phénomène d’exclusion sociale en raison même de son désengagement dans le domaine du tourisme social au profit d’une conception lucrative de ce secteur. Réinvestir dans une véritable politique publique du droit aux vacances n’est pas une lubie. Elle peut faire hurler certains, mais, après tout, l’État n’a-t-il pas mis la main à la poche pour soutenir de grands groupes économiques sans contrepartie ? Tout est toujours affaire de choix.

 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

COMPAGNONS !

Je garderai de vous, compagnons de misère, au blanc de mes jardins la noirceur de vos pas, des rides de douleur sur une eau qui fut claire...