« Quand tu ne sais répondre à une question, réponds
par une autre question !» Le vieil adage, qui a sorti de l’embarras bien des
éditocrates, vient de trouver une traduction politicienne bien singulière. Nous
savions depuis des décennies que François IV était obsédé par la tenue des
finances publiques, thème qu’il porta jadis lors de trois campagnes
présidentielles. Alors que les Français souffrent socialement, et qu’ils se
disent mobilisés par le pouvoir d’achat, les retraites, voire l’idée d’une
meilleure représentation démocratique par l’introduction de la proportionnelle
aux législatives, le premier sinistre, incapable de répondre à ces questions, a
sorti de son chapeau un tout autre sujet, comme s’il voulait partager son
obsession, sinon l’imposer à tous les citoyens. Ainsi vient-il d’annoncer, dans
les colonnes du Journal du dimanche, détenu par Vincent Bolloré, qu’il
envisageait la convocation d’un référendum afin que les Français approuvent une
baisse drastique de la dépense publique. Les mots de François IV sont assez
clairs : «Il faut un plan complet de retour à l’équilibre», prévient-il. D’ici
quelques années, «le seul service de la dette – c’est-à-dire les intérêts
annuels – pourrait atteindre 100 milliards d’euros», alerte-t-il, soit les
«budgets de l’Éducation nationale et de la Défense réunis». La ficelle est
énorme…
François IV veut que les Français adoptent par
référendum un « plan de réformes » qui ressemblerait à s’y méprendre à un
projet de loi de finances. Coup de bluff ou coup de force contre la
représentation nationale, sachant qu’en République la normalité consiste à ce
que ce soit l’Assemblée nationale qui vote le budget ? Et pourquoi pas une
forme d’impuissance, face à un sujet qui le dépasse ? D’où la pirouette,
puisque jamais les Français n’auraient imaginé un jour être consultés sur ce
sujet. Car l’idée surréaliste du premier sinistre serait donc de faire avaliser
par le peuple lui-même un plan de super-austérité… dont il serait la première
victime. Aussi entend-il revenir, à l’horizon de quatre ans, « sous la barre
des 3% (du PIB) de déficit ». Il était de 5,8% l’an passé. Pour cela,
l’économie à réaliser est de l’ordre de « 40 milliards » d’euros, projette-t-il
en partie en révisant à la baisse les effectifs de fonctionnaires, proposition
qu’il assume. En ligne de mire, également, la Sécurité sociale. Pour mémoire,
lors de sa déclaration de politique générale en janvier, François Bayrou avait
estimé que la moitié du déficit de l’État était imputable au système de
retraite.
Résumons le programme : des méga coupes budgétaires
dans les services publics et les prestations sociales, voire une hausse de la
durée du travail, et évidemment rien sur la maudite réforme des retraites. En
soumettant ce plan à un référendum, François IV ne vise rien de moins qu’à
obtenir l’adhésion des Français à un processus inique et global qui demandera
des efforts à tout le monde. Ou comment transformer un acte démocratique – un
référendum – en une puissante entreprise idéologique dont le seul but reste de
promouvoir la doxa libérale auprès des Français. N’en doutons pas : la manœuvre
politique est impressionnante… et peut impressionner. Difficile d’imaginer
l’adhésion des Français à une cure d’austérité sans précédent, alors que ces
derniers restent opposés à 68% à la réforme qui les oblige à travailler deux
ans de plus. Puisque chacun y va de son idée, voici celle du bloc-noteur : en
quatre décennies, en France, 10% de la valeur ajoutée est passée du travail au
capital. L’un des casses du siècle les plus monumentaux, puisqu’il représente
quelque 300 milliards d’euros ! En somme, la part revenant aux salariés a chuté
progressivement dans le pays. Selon l’Insee, elle était de 75% au début des
années 1980, elle stagne désormais autour de 65%. N’importe quel spécialiste un
peu sérieux vous le dirait : la répartition de la valeur ajoutée entre le
capital et le travail constitue un enjeu économique et politique fondamental,
un choix de société. Et si on organisait un référendum ?
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