mercredi 14 mai 2025

« Disparition des maternités : une question d’égalité », l’éditorial de Laurent Mouloud dans l’Humanité.



La disparition des maternités est un sujet trop sérieux pour être laissé aux seules mains du dogmatisme comptable. C’est le sens de la proposition de loi du député Paul-André Colombani (Liot) qui doit être débattue ce jeudi 15 mai à l’Assemblée nationale.

En exigeant un moratoire immédiat de deux ans sur les fermetures des petites structures, l’élu pointe l’urgence d’une situation devenue dramatique. Et tente d’insuffler un peu de rationalité et d’intelligence démocratique dans une mécanique aveugle de destruction des services publics qui ne jure que par les « regroupements de moyens » et « l’optimisation des coûts ».

En moins de cinquante ans, près des trois quarts des maternités ont disparu. Justifiées, un temps, au nom de la sécurité et des progrès médicaux, ces fermetures se sont intensifiées depuis deux décennies sous la pression des contraintes budgétaires, de la pénurie de soignants et d’une logique de rentabilité délétère.

Les arguments pour justifier cette concentration des établissements sont toujours les mêmes : présence médicale garantie, risques obstétricaux minimisés… Mais ils ne disent rien des conséquences en cascade de la désertification des territoires. Comment prétendre à plus de « sécurité » quand, chaque année, plus de 7 000 femmes accouchent sans avoir eu le temps d’atteindre un établissement de santé ? Comment parler d’« optimisation » quand des patientes, faute de personnel suffisant, affrontent ce moment crucial de leur vie quasi seules dans des usines à bébés saturées ?

N’en doutons pas. Cette dégradation de l’accès aux soins participe de l’inquiétante augmentation, depuis 2020, de la mortalité infantile en France, devenue l’une des plus élevée d’Europe. Elle creuse les inégalités dans les zones rurales et les quartiers populaires, là où l’offre médicale est déjà fragilisée.

Elle nourrit – légitimement – un sentiment d’injustice et de relégation face à un État qui les abandonne. Les maternités ne sont pas des entreprises qui l’on gère à coup de « seuil ». L’accouchement réclame proximité, écoute, soins. Le maillage territorial ne doit plus être une simple variable d’ajustement qui néglige les vies et les corps. Mais un acte politique fort, fondé sur le respect du droit des femmes à avoir un égal accès aux soins périnataux.

 

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