vendredi 17 janvier 2025

« L'IVG, marqueur d’égalité », l’éditorial de Stéphane Sahuc dans l’Humanité



Le 17 janvier 1975, la loi Veil légalisant l’interruption volontaire de grossesse est promulguée par le gouvernement français. Cinquante ans après, comme ils le font tous les ans depuis 2005, les anti-IVG vont défiler dans les rues de Paris. On aurait tort de penser que cette manifestation est de l’ordre de l’anecdotique ou le fait d’une poignée de grenouilles de bénitier réactionnaires. On aurait encore plus tort de croire que le droit à l’avortement, même constitutionnalisé, est un acquis intouchable.

Le combat que mènent les réactionnaires de tous poils contre l’IVG s’inscrit aujourd’hui dans un mouvement plus vaste d’attaque contre les femmes. L’objectif est de les renvoyer dans leur immense majorité à un rôle de mère, d’épouse ou d’objet sexuel. Et cette lutte acharnée contre le concept même d’égalité entre les femmes et les hommes est menée à l’échelle mondiale.

À commencer par le sort fait aux femmes afghanes, enfermées, frappées, interdites de tout. Dans nos sociétés libérales et démocratiques, les femmes sont aussi dans le viseur. Particulièrement aux États-Unis. Sur les réseaux sociaux, les mentions « ton corps, mon choix » et « retourne dans la cuisine » ont augmenté de 4 600 % en seulement 24 heures après l’élection de Donald Trump.

Mark Zuckerberg, le patron de Meta, dénonce, lui, un « monde de l’entreprise culturellement émasculé » et exalte « l’énergie masculine et les bienfaits de l’agressivité ». Au passage, notons que Zuckerberg opère en réalité un retour aux sources, puisque à l’origine Facebook était une application pour comparer et noter le physique des étudiantes de Harvard.

En France aussi, masculinisme, sexisme et virilisme sont mis en avant, valorisés, glorifiés même, par nombre d’influenceurs qui touchent essentiellement des jeunes hommes et des adolescents. Ils sont l’une des portes d’entrée qui conduisent ensuite vers les contenus ouvertement d’extrême droite, au cœur desquels la lutte contre l’IVG. Cinquante ans après la loi Veil, le droit à l’avortement et les conditions d’accès à ce droit restent des marqueurs du sort et de la véritable place des femmes dans la société.

 

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