Combien de morts sous les décombres
enchevêtrés ?
Combien de blessés que les établissements de santé dévastés ne pourront pas
soigner ? Combien d’enfants traumatisés ? Combien de temps,
encore, pour comprendre que les Mahorais ne sont pas simplement les énièmes
malchanceux d’une quelconque « catastrophe naturelle », mais les
doubles victimes du réchauffement climatique et de l’incurie de Paris ?
Chido, renforcé par l’élévation des températures océaniques, a transformé
Mayotte en champ de ruines en frappant l’archipel de ses vents surpuissants.
Les bâtiments « en dur » ont été très endommagés, les immenses
bidonvilles de toile et de tôle, refuges précaires de près de 100 000
personnes, ont été pulvérisés. Le Giec a de longue date documenté le phénomène.
À la faveur du réchauffement global, les cyclones tropicaux se renforcent, en
fréquence et en puissance. Les petites îles sont les plus vulnérables et les
populations précaires les premières victimes. Mayotte est une synthèse. Chido
n’est pas et ne restera pas un cas isolé.
Dans le 101e département français, où 77 % de la
population survit en dessous du seuil de pauvreté, où le taux de chômage tutoie
des sommets, où l’eau potable n’est accessible qu’aléatoirement et où le
choléra continue de tuer, la faillite de l’État est généralisée. Terrain
privilégié des expériences sécuritaires du ministère de l’Intérieur, l’île,
devenue le laboratoire de pratiques anti-immigration aussi inhumaines
qu’inutiles, est en réalité en proie, plus qu’aucun autre territoire de la
République, à l’abandon systématique des pouvoirs publics.
Les grandes tirades et les beaux discours de solidarité des
ministres démissionnaires sont inaudibles. Oui, l’aide d’urgence est
indispensable et la reconstruction des infrastructures une priorité. Mais,
au-delà de l’immédiat, aux habitants de Mayotte, l’État doit bien
davantage : le respect de leurs droits, l’accès aux services publics,
l’égalité, la sécurité, la fin d’une logique coloniale mortifère, désormais
meurtrière.
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