lundi 6 février 2023

Nouvelle : « Croisière d’espoir ? »



Partis tout pleins d’espoir sur des bateaux infâmes de passeurs véreux. Après des jours de mer, parfois plane, souvent dure, entassés et malades arrivent enfin à Lampedusa. La fin du cauchemar, l’espoir alors renaît. Leurs yeux brillent de joie ; leurs visages se tendent vers la terre de vie, où dit-on, tout est beau. On y est accueillis. On y mange à sa faim. On y est bien logés. On y trouve du travail. On y vit très heureux. Mais voilà qu’une vague, plus forte que les autres, embarque tout plein d’eau. Le bateau trop chargé prend une forte gite. Fusent des cris d’effroi, on se rue vers l’avant, on se rue vers l’arrière, on se bouscule en vain, on se pousse, se piétine. L’eau s’infiltre partout. Le bateau, lourd, s’incline. Les passagers glissent, passent par-dessus bord. Tout autour du bateau, ce n’est que cris, appels. L’eau est dure, sombre, glaciale, ennemie. On s’appelle, on supplie. Peu de mains se tendent parmi les compagnons, eux-mêmes occupés à leur propre survie. Alors, on se débat dans cette eau si froide. ; paniqués, on coule irrémédiablement. Enfin une vedette ; la marine italienne repêche les noyés, repêche les rescapés, secourt et réconforte, les conduit au rivage, où ils sont accueillis. Ils sont identifiés, entassés et parqués. On se compte, se recompte, combien en manque-t-il ? Combien n’arriveront pas, perdus à tout jamais, dans a mer sans pitié. Et à Lampedusa, amère désillusion. Tout est laid, repoussant. On est mal accueillis et à peine nourris. On n’a pas de travail, on y est malheureux. On y pleure, on y râle, il faut se résigner. Demain on partira, on ira vers l’ailleurs, vers des temps bien meilleurs. Espoir, désespoir, espoir. Des migrants, des réfugiés, des exilés.

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