POST. Il fallait s’y attendre. Un post, une prise de position… et la Toile s’est enflammée. Depuis le 25 mars, Teddy Riner se trouve au milieu d’une tempête médiatique qui agite les réseaux sociaux. Alors que le débat sur une potentielle interdiction des signes religieux lors de certaines compétitions sportives s’emballait au Parlement, attisé par la droite et l’extrême droite, le plus grand judoka de l’histoire prenait donc la parole.
Son
post ne passa pas inaperçu : « Le sport doit rester un espace
où chacun peut s’exprimer, s’épanouir et se rassembler dans le respect des
règles et de l’éthique sportive. » Une phrase plutôt apaisante. Suivie
d’une traînée de poudre. « Pour qui se prend-il ? » « Un
sportif ne doit pas donner son opinion. » « Pourquoi prend-il
le risque de parler ainsi ? » Que n’avons-nous pas entendu, ces
deux dernières semaines, sur Cnews, RMC ou BFM, autant d’injonctions à se taire
proférées par des petits marquis éditocrates donneurs de leçons. « Teddy
Riner, champion engagé », titrait le Parisien cette semaine, comme
une simple constatation. « Engagé » : le mot est lâché.
ATAQUES. Cette polémique
absurde n’est pas sans nous rappeler celle suscitée par Kylian Mbappé, le
capitaine des Bleus, lors du dernier Euro de foot, quand il avait exhorté les
Français à ne pas porter au pouvoir l’extrême droite, en pleine élection
législative. Mbappé et Riner seraient donc « trop » citoyens, pour
oser dire ce qu’ils pensent dans des moments où la société française se
tend et cherche une boussole ?
L’appel à « l’apaisement »
de Teddy Riner provoqua évidemment une réaction de notre sinistre de
l’Intérieur, Bruno Retailleau, ce dernier précisant qu’il ne « tacle
personne et surtout pas Teddy Riner ». Une touche humoristique sur une
thématique sérieuse, démontrant surtout qu’il n’est pas si aisé de parer aux
attaques du quintuple médaillé d’or olympique, même lorsqu’on occupe la célèbre
Place Beauvau. Car ces dernières semaines, le judoka n’hésite plus à prendre
des positions tranchées. Voile dans le sport : Riner parle. Situation
économique aux Antilles : Riner s’indigne. Budget des sports au
lendemain des Jeux de Paris : Riner se fâche. Et sa voix porte !
LUTTE. Le bloc-noteur
n’ira pas jusqu’à convoquer les grands athlètes qui marquèrent l’histoire, en
la transformant, de Gino Bartali à Megan Rapinoe, en passant par Tommie Smith
ou Muhammad Ali bien sûr, autant de noms qui s’engagèrent politiquement, par
des gestes symboliques de résistance, déployés sur la pelouse d’un stade ou sur
des podiums de jeux Olympiques.
L’impact sur
les opinions publiques n’est plus contestable, quand le sport devient un
« outil » de lutte politique, alors que, dans la charte olympique,
l’article 50 stipule : « Aucune sorte de démonstration ou de
propagande politique, religieuse ou raciale n’est autorisée dans un lieu, site
ou autre emplacement olympique. » Teddy Riner, lui, interroge : « Si,
en tant que sportif, je ne prends pas la parole, qui le fait ? »
Et il ajoute : « Je suis désolé de mettre cette pression sur ce
ministre, mais quand on dit, on fait », s’adressant directement à
Manuel Valls, ministre des Outre-mer. Riner n’en reste pas là : « Je
suis le seul décideur de mes prises de position, explique-t-il au Parisien.
Quand je défends le budget pour le sport, ce n’est pas le haut niveau que je
défends, mais le sport pour tous, celui de nos enfants. Je suis là pour aider,
sur des causes qui me tiennent à cœur. Mon rôle d’athlète, c’est aussi
d’avoir des avis. J’ai 36 ans, la carrière, les épaules et la légitimité,
je pense, pour le faire. »
Comme le dit
son avocat, Didier Poulmaire : « Les sportifs ne sont pas des
sociologues mais pourquoi ne devraient-ils pas dire ce qu’ils pensent ?
Les athlètes touchent les gens, on se doit de leur faire une place dans la
société et de les associer aux débats. On peut ne pas être d’accord avec lui,
mais on ne peut pas le museler. » Qui oserait ?
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